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Funny Madness
30 janvier 2011

Tron l'héritage

tron_legacyTitre original : Tron legacy
Genre : fucking biblical
Réalisation : Joseph Kosinski
Scénario : Edward Kitsis et Adam Horowitz
Casting : Jeff Bridges, Garrett Hedlund et Olivia Wilde
Photographie : Claudio Miranda
Musique : Daft Punk
Durée : 2H05
Sortie : 09/02/2011
Note : 8/10

Sam Flynn, 27 ans, est le fils expert en technologie de Kevin Flynn. Cherchant à percer le mystère de la disparition de son père, il se retrouve aspiré dans ce même monde de programmes redoutables et de jeux mortels où vit son père depuis 25 ans. Avec la fidèle confidente de Kevin, père et fils s'engagent dans un voyage où la mort guette, à travers un cyber univers époustouflant visuellement, devenu plus avancé technologiquement et plus dangereux que jamais...

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Il est intéressant de se rendre compte que les films utilisant les technologies les plus avancées ont des sujets paradoxalement tournés vers le passé. Par exemple, jurassic park ressuscite un monde préhistorique par la grâce du CGI ou avatar emploie la révolution de la performance capture pour conter une histoire appelant à renouer avec la nature. “Conter” c’est là toute la différence entre ces films et leurs successeurs souvent d’une grande banalité. Ces films ont réussis à intégrer la technologie comme un moyen d’expression de leurs thématiques. La simplicité des histoires choisies n’a rien à voir avec une facilité mais cherche à démontrer la manière dont une nouvelle forme d’expression peut transcender et donner tout son poids à l’histoire la plus traditionnelle. On peut même dire qu’on arrive grâce à elle à obtenir un nouveau degré de réflexion dessus. La technologie du futur nous permet finalement de comprendre notre passé. En son temps, Tron l’avait bien compris. Intégrant à l’histoire son ambition de création d’un monde numérique (ce qui lui permet d’ailleurs de survivre à l’épreuve du temps), le film faisait pourtant revivre des figures qui avait plus à voir avec la fantasy moyenâgeuse que la pure science-fiction. Dans un univers sous le joug d’une puissance maléfique, on découvrait ainsi des personnages assurant des fonctions telles que guerriers (Tron, unique programme capable d’annihiler le Master Control), magiciens (le concepteur pouvant influer sur la matière informatique) ou vil bras droit obsessionnel (le redoutable Sark). A cela se rajouter bien sûr une illustration des jeux vidéo renvoyant aux combats d’arène de la Rome antique. Un regard futuriste vers des archétypes passés en somme et une position que Tron legacy est loin de renier.

Ceux qui espéraient une histoire complexe de la part de cette suite tardive en auront pour leurs frais. Car Tron legacy nous offre l’histoire la plus connue du monde : la lutte du bien contre le mal. Basique ? Simplissime ? Foutage de gueule ? Que nenni puisque notre histoire nous renvoie à des connotations bibliques lui donnant toute son envergure. Kevin Flynn est ainsi désormais ni plus ni moins que Dieu. Par sa connaissance informatique, il est devenu le créateur d’un tout nouveau monde. Pour le rendre le plus parfait possible, il s’invente un fidèle bras droit à son image nommé CLU. Celui-ci l’aide dans sa tâche jusqu’à l’apparition d’une nouvelle forme de vie dans ce monde. Flynn n’a qu’admiration pour celle-ci alors que CLU n’y voit que des êtres imparfaits qui n’ont pas leur place dans la perfection réclamée par son créateur. Il se rebelle donc contre ce dernier et jure d’annihiler cette inacceptable source de satisfaction. En terme d’enjeux et de rapports de force, nous sommes ni plus ni moins que devant le conflit entre Dieu et son âme damnée, le diable.

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Du plus fidèle allié est né l’ennemi juré à cause d’une différence de point de vu sur le même objectif. En ce sens, CLU utilise les mêmes armes que le diable : la manipulation des enfants du créateur. Il détourne ainsi l’attention des programmes par ses spectaculaires jeux d’arène et en formate d’autres pour les faire rejoindre sa cause. Lors de leur première rencontre, il n’hésite d’ailleurs pas à se faire passer devant le héros pour son père. Bien sûr, l’idée du fils de Dieu qui débarque dans ce monde et devra en assurer son salut en le traversant jusqu’à rejoindre l’autre ajoute à la dimension biblique du film. À cela, on pourrait rajouter des notions plus bouddhistes non moins négligeable. Cela se note tout particulièrement dans le comportement de Kevin Flynn. En prêchant l’inaction face à l’ennemi (il est convaincu qu’un simili karma conduira à la perte de CLU) ou en reconnaissant l’impossibilité de la perfection (lui-même et CLU sont l’illustration que le bien et le mal ne peuvent exister l’un sans l’autre), il exploite certains préceptes de la théorie du juste milieu. Peut-être pas rien si le réalisateur choisit pour sa réapparition dans le récit de le dévoiler dans la position du lotus.

Cette captivante portée spirituelle rendue d’autant plus forte par son télescopage dans un univers atypique est toutefois contrecarrée par les difficultés à laisser s’y développer une dimension humaine. La mythologie a une structure tellement dense et lourde de sens que les personnages peinent à s’y épanouir. Du coup, malgré de bonnes idées, le script ne tire pas le meilleur parti de ses caractères. La fascination de Quorra pour l’au-delà est ainsi rapidement expédiée n’arrivant à octroyer qu’une touchante image finale. Quant au rapport de Sam Flynn et son père, on aurait aussi voulu quelque chose de plus poussé notamment par rapport au double rôle de Jeff Bridges (tour de force qui conduit à l’un des rares effets CGI mitigés du film). Lors du climax, Kevin n’hésite pas à foutre quelques gnons dans la gueule de CLU. Si il a réussi au cours du film à se réconcilier avec la figure du père bienveillant, il ne voue finalement que haine pour sa volonté obsessionnelle de créer un autre monde. Cette volonté a conduit son père à l’abandonner et s’incarne toute entière dans CLU. La confrontation aurait pu avoir ainsi une vraie portée émotionnelle mais l’exploitation de cette dualité a été tellement peu planifiée tout au long de l’intrigue qu’il n’y a pas grand-chose qui ressort. Le réalisateur Joseph Kosinski démontre plus que jamais son manque de maîtrise sur les sentiments de ses personnages lorsque dans ce même climax, il nous sort des flashbacks de fort mauvais aloi.

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Mais on peut bien lui pardonner. Après tout, c’est un premier long et pas le plus simple à mettre en boîte (vous en connaissez beaucoup des jeunots à qui ont filent des grosses productions à 150 millions de dollars pour leurs débuts ?). On peut comprendre qu’il est dû se concentrer plus particulièrement sur sa technique pour illustrer l’univers si particulier de Tron. Car après tout, il y avait un lourd challenge. Le film originel avait réussit à faire accepter les formes basiques des éléments numériques par la justification d’un univers informatique. L’argument est aujourd’hui dépassé et le film ne pouvait se contenter de construction d’un tel acabit. Pour autant, il ne fallait pas renier la chartre graphique précédemment établi. Les connaissances de Kosinski en matière d’architecture ont dû être fort utiles à cet effet. L’esthétisme contient ainsi toujours cette idée de lignes géométriques claires et précises mais s’inscrivant désormais dans une optique architecturale plus complexe. Dopé par des effets spéciaux nickels, le résultat est du plus bel effet avec des choix de textures alléchants (les arènes en verre construites sur plusieurs niveaux) et une mise en scène habile pour en exploiter la composition. Une qualité se retrouvant tout particulièrement dans les scènes d’action comme dans cette mémorable bataille aérienne.

Avec sa musique qui finie par devenir hypnotisant (peu appréhendable à la première écoute, on en saisie la puissance au fil des écoutes), Tron legacy scotche par son côté impressionnant culturellement et esthétiquement parlant. On regrettera juste que le script n’arrive pas à relier pleinement sa mythologie avec une dimension humaine capable de la déconstruire. Mais bon, n’est pas Cameron qui veut.

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  • Funny Madness n'a qu'une ambition : l'exploration de ma passion pour le cinéma. Comme le laisse entendre le titre du blog, j'affectionne les paradoxes et la manière dont je parlerais reflèteront ce désir d'assimiler autant de chef d'oeuvre que de navet.
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