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Funny Madness

11 avril 2011

this is the end

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Après moins d'un an d'existence, l'aventure de funny madness prend déjà fin. Mais ça n'est pas pour ça que je vais me tourner les pouces et abandonnez l'exploration du si fascinant 7ème partie. Ayant répondu à l'appel d'anciennes connaissances, je rejoint l'équipe du tout nouveau site courte-focale. Avec trois autres collaborateurs, nous aborderons le cinéma du monde entier et de manière la plus éclectique : vieux et récent, bon ou mauvais, européen comme américain, blockbusters et cinéma d'auteur. Le cinéma est fait de tout et nous essayerons de la balayer sans distinctions. J'espère donc vous y retrouver très bientôt.

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27 février 2011

Critiques en vrac : spéciale Argento/Harlin

Critiques en vrac un peu particulier ce mois-ci puisqu’entièrement consacré à 2 grands cinéastes issus de notre cher Europe dont je me suis fait/refait un certain nombre de films ce mois-ci.

Dario Argento : le génie, l’arnaque ou le génie de l’arnaque ?

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Disons le net, je ne suis pas un grand fan de Dario Argento. Malgré mon affection pour le cinéma d’horreur, j’ai toujours eu du mal à appréhender les œuvres de ce maître de l’épouvante. J’ai même de graves difficultés à rester calme face à la prétention du bonhomme, méprisant le travail d’écriture et s’exclamant à longueur de pellicule “ma caméra se suffit à elle-même !”. Cette approche qui revendique un rejet des conventions sous le prétexte qu’il vaut mieux que ça m’échauffe les nerfs au plus haut point. Mais bon, son cinéma dit “de séquences” est au moins agréable à suivre de par ses évidentes qualités visuelles et j’espère toujours retomber sur un opus à la mesure de profondo rosso, seule œuvre d’Argento que je tiens en très haute estime. Profitant de la sortie groupée effectuée par Wild Side il y a quelques mois, je me suis dit qu’il était temps d’essayer de trouver satisfaction dans les œuvres les plus essentiels du bonhomme.

Ténèbres (1982)

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C’est donc avec plein d’espoir que je me suis aventuré vers ténèbres... pour en ressortir avec une impression d’œuvre sympathique mais loin d’être à la mesure de sa réputation. Je me souviens que dans le long documentaire sur le dvd collector de profondo rosso, Argento définissait ténèbres comme un cri de colère et une certain attaque envers la critique (Vous croyez que je fais uniquement des films d’horreur pornographiques pour psychopathe ? Ben je vais vous montrer ce que c’est qu’un vrai film d’horreur pornographique pour psychopathe !). Une ambition qui annonçait une œuvre enchaînant à la pelle les excès horrifiques propices à rendre plus acceptable une structure en saynète. Double désappointement, ténèbres n’a plus grand-chose de bien choquant (la séquence à la Pollock est fabuleuse mais le reste n’offre rien de bien exceptionnel graphiquement) et déroule une trame assez classique en dépit de tout ce que le film peut avoir de nouveau chez Argento (utilisation de l’architecture moderne, photographie lunaire délaissant toutes zones d’ombre). Même la mise en scène ne me semble pas toujours à la mesure de ce qu’elle est censée offrir entraînant à mon sens un décalage avec la génial BO complètement déchaînée pour sa part. Il y a énormément d’idées brillantes mais je trouve que l’imagerie s’en dégageant n’a pas l’impact escompté. Je classe tout particulièrement là-dedans le célèbre plan à la louma. J’avais vu les images de tournage et j’avais été très impressionné par le dispositif. A l’écran, on récolte essentiellement un long gros plan sur du béton et des tuiles et on ne sent aucunement l’amplitude du mouvement.

Là où le film marque des points à mes yeux c’est de par le télescopage du réalisateur avec son personnage principal. La perspective donne énormément de poids au film et le rend très savoureux par moment (la citation du chien des Baskerville qui résume toute sa carrière cinématographique). Et le final est d’ailleurs fortiche pour désarçonner le spectateur. J’adore d’ailleurs cette idée pour mettre à mort le tueur. Malgré l’ingéniosité de la mécanique qu’il a mis en place, celui-ci va mourir de manière incongrue empalé sur une statue. Chez Argento, la plus huilée des narrations ne peut décidément rien face à la toute puissance esthétique. J’apprécie également l’ouverture montrant le tueur lire tranquillement le roman au coin du feu. Ce feu est illustré comme sa pulsion meurtrière qui bouillonne au fond de lui et qui ne demande qu’à sortir. Au bout du compte, le tueur jette le roman dans le feu ce qui attise les flammes. C’est une très belle illustration d’une idée que Craven ne saura faire passer qu’à travers une réplique dans son scream : les films ne créent pas de psychopathes mais les rend plus inventifs. Ce genre de passage arrive à me faire convaincre que j’ai passé un bon moment mais ça ne me fera définitivement pas considérer Argento comme un génie du genre.

Mother of tears (2007)

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Comment ça j’ai dit que je me concentrerais sur les œuvres essentielles d’Argento ? Vu que je suis pas du genre à tenir mes promesses, je n’ai pas pu m’empêcher de jeter un œil sur ce si conspué mother of tears. Vu la réputation du film, je m’attendais à quelque chose de magique. Et effectivement, c’est une fabuleuse contre-performance que nous livre Argento. L’objet est fort étrange tant il ne laisse jamais le spectateur s’habituer à ce qu’il voit. Le film change en effet régulièrement de ton comme si il ne savait pas sur quel pied danser. En relisant le HS Mad sorti récemment, il y était dit que le budget a été considérable réduit à la veille des prises de vue et que Argento a du remanier son script en plein tournage. Cela expliquerait l’aspect polyvalent du film. Ça commence ainsi plutôt bien. Bon Argento force toujours le trait pour plier l’histoires à ses envies filmiques mais le bonhomme sait encore plutôt bien tenir sa caméra (faut quand même supporter l’immonde photographie) et la musique de Claudio Simonetti avec ses chœurs perpétuels est assez sympa. Puis vient le premier meurtre et là on se dit qu’Argento il a peur de rien. Une pauvre demoiselle va ainsi connaître une quadruple mise à mort. Elle va ainsi se faire démonter la mâchoire, éventrer, étrangler avec ses propres entrailles et finalement dévorer par des monstres de carnaval. Un empilage d’atrocité chargeant la mule et tellement desservi par des maquillages ridicules qu’on s’en amuse plus qu’on ne s’en effraie. Mother of tears semble donc parti vers un rigolo déchaînement de violence zarbi.

Ben finalement non. Par la suite, on passe un nouveau palier et Argento nous offre avec joie de grandes discussions fascinantes dignes d’un téléfilm FR3. Un train-train aussi ronflant qu’incohérent semble se mettre en place et puis boum Argento nous balance sa vision du fantastique dernière manière. Là il nous offre les apparitions impayables de Daria Nicolodi et réduit à néant une mythologie ambitieuse par une illustration poussive à souhait. Difficile en effet de prendre au sérieux la menace du film constituée par une bande de sorcières incarnée à l’écran par une tripotée de biatch mal fringuées qui passent leur temps à rigoler bêtement. Un choix effarant de débilité qui peut difficilement être justifié par l’argument du manque de moyen. Celui-ci peut toutefois bien être invoqué pour la représentation du chaos dans lequel est censé plonger Rome. Avec des possibilités limitées, l’horreur à grande échelle sous l’œil du cinéaste ne devient plus que quelques exactions éparses interprétées sans conviction par de pauvres figurants (2 mecs détruisent une voiture : le monde est vraiment proche de la fin) et mis en boîte de manière rocambolesque (mention au meurtre du bébé). Mother of tears ressemble au bout du compte à un incroyable accident de la route : c’est stupide, abominable à voir et pourtant fascinant. Il a au moins ça pour lui.

Le chat à neuf queues (1971)

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A la base, l’étape suivante de ma rétrospective devait être trauma. Vu sa réputation, je me suis dit que ça aurait été sûrement un peu trop douloureux après mother of tears. Je me suis donc rabattu sur le chat à 9 queues. Et quelle belle surprise que ce deuxième long du bonhomme ! C’est en tout cas la preuve inéluctable que les jeunes cinéastes font toujours des maladresses sur leurs premières œuvres qu’ils tenteront d’expurger par la suite. Ben oui parce qu’avec le chat à 9 queues, Argento va nous raconter une histoire. Roohhh quelle connerie il a fait là ! Blague à part, j’ai justement été séduit par la certaine retenue du film. Il est assez logique qu’Argento se soit éloigné du film qualifiant sa recette de “trop américaine”. C’est justement par cet aspect que le film est intéressant. Le chat à 9 queues prend finalement le meilleur des deux mondes. D’un côté, on a la rigueur hollywoodienne avec une intrigue tenant la route où se construisent mystère et suspense. De l’autre, il y a le formalisme génial d’Argento. Il aligne ainsi les cadrages soignés, les mouvements de caméra brillants et autres vues subjectives immersives mais ne tombe pas pour autant dans le piège de “l’esthétisme pour l’esthétisme”. Ses effets servent toujours le déroulement du récit permettant d’aboutir à un divertissement de fort belle tenue. Le film souffre quand même de quelques coups de mou et certaines idées ne sont pas aussi charmantes qu’elles devraient l’être (l’atypique tandem principal composé d’un journaliste et d’un aveugle manque un peu de synergies) mais c’est quand même un beau boulot efficace et carré qui ne trahit pas particulièrement les obsessions de son auteur (la perception de l’environnement cinématographique par les personnages et le spectateur a toujours autant d’importance). Peut-être pas aussi marquant et définitif qu’un profondo rosso, le chat à 9 queues se place néanmoins sans problème dans le haut du panier de la filmographie d’Argento à mes yeux. 

L’oiseau au plumage de cristal (1970)

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Galvanisé par la découverte du chat à neuf queues, je me suis plongé avec beaucoup d’enthousiasme dans cet oiseau au plumage de cristal. Trop d’enthousiasme et j’ai eu la désagréable impression que ce premier film d’Argento ne vole pas sa réputation d’œuvre matricielle : il contient tout ce qui me bloque chez le bonhomme. Je comprends cela dit un peu mieux pourquoi Argento a plus ou moins désavoué le chat à neuf queues et préfère exprimer son affection pour l’oiseau au plumage de cristal. Le chat à 9 queues était efficace, carré et d’un professionnalisme complet. En bref, un enfer pour quelqu’un comme Argento chez qui tout doit être imprévisible et le récit fluctuant selon ses appétits. L’oiseau au plumage de cristal dévoile plus volontiers la fibre artistique du bonhomme et donc ses partis pris qui n’ont guère mes faveurs. L’intrigue joue donc sans complexe sur l’improbabilité de ses situations et un certain libertinage narratif. Argento se désintéresse de l’enquête policière et la triture au profit de ses scènes chocs souvent incongrus. Cela peut conduire à offrir des passages puissants (le meurtre d’ouverture et les tentatives pour la décrypter) et d’autres plus risibles que terrifiantes (le tueur bloqué au seuil de la porte de sa victime commet l’ultime outrage en y creusant un trou : mais quelle ordure quand même !). Reste heureusement que malgré des artifices parfois rudimentaires (mais naturel pour un premier long), le film fait preuve d’une maîtrise cinématographique toujours alléchante avec des idées brillantes à foison. Mais bon, c’est quand une déconvenue en bout de course.    

Trauma (1993)

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Le voilà donc le si redouté trauma. L’infâme trauma, l’inexcusable trauma, l’involontairement drôle trauma, le foireux trauma ou encore l’embarrassant trauma comme on aime à dire. Mais pourquoi tant de haine, ai-je envi de dire ? Je trouve que cette œuvre si décriée a des atouts pour se défendre. Le point principal reste à mes yeux une toujours aussi évidente maîtrise cinématographique. Le premier meurtre m’a d’ailleurs bien mit en confiance. Idées de cadrages brillantes, photographie travaillée (même si l’esthétisme évoque plus un Brian de Palma que du Argento pur jus) et usage alléchant de la steadicam sont au rendez-vous pour une scène classique du genre mais rondement mené. Bon après, je ne peux que reconnaître que je désenchante face à la première rencontre des deux personnages principaux dont l’absurdité totale est sidérante. D’après ce que j’ai lu (toujours dans le HS de Mad), il s’agit là d’une des scènes qui aurait été retourné suite à une politique de remontage du film. Déjà bien mis à mal par des réécritures inopportunes (vu la matière à disposition et la manière dont en parle les intéressés je suis convaincu que les premières montures du script auraient pu donner un excellent film), trauma prend l’eau. La manière dont Argento filme la rencontre est d’ailleurs équivoque quant au détachement dont il fait preuve. Plutôt que de concentrer sa caméra sur les comédiens, il préfère composait un large (et beau) plan sur le pont dans lequel les acteurs n’ont plus qu’une place accessoire. Pas mal d’idées de ce genre reviennent au gré du film, notamment avec cet étonnant travelling lors du générique de fin (effet gratuit conduisant à une bonne blague). En soit, je me montre indulgent face à une œuvre à la conception si douloureuse et qui fut tellement trituré qu’elle présente des plaies béantes dans lesquelles le spectateur ne peut que tomber. Le film est monté à la serpe (Argento aime les transitions brutales mais là c’est d’une stupidité qui dévoile clairement des coupes), manque de gore (même si il en montre assez sur ce point pour me convaincre) et n’arrive pas à atteindre le degré émotionnel désiré (difficile de s’attacher au couple principal, surtout vu la qualité de l’interprétation). Mais trauma reste porté par les vastes attirails de mise en scène chers à son auteur et surtout par une indéfectible volonté de porter son histoire. Vu que généralement Argento fait l’inverse, je ne peux qu’exprimer ma sympathie face à la démarche aussi boiteuse soit-elle.   

Inferno (1980)

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Malgré les difficultés que j’ai eu devant le visionnage de suspiria, j’étais assez enthousiaste à l’idée de découvrir un inferno depuis si longtemps inaccessible dans nos contrées. Sans surprise, le film tient effectivement beaucoup à son visuel. C’est un éblouissement de tous les instants. Les décors élaborés sont magnifiques, la photographie avec ses jeux de couleurs est sublime, la mise en scène en jettent plein la gueule et certains plans sont complètement incroyables (l’apparition de la mort). Toutefois, bien qu’il soit considéré comme une des œuvres d’Argento où le scénario est le plus en retrait (on le compare souvent à un opéra), je n’ai pas trouvé celui-ci si catégorique au regard de l’évolution du récit. Suspiriamettait en scène un personnage principal qui était appelé à mener son enquête sur certains évènements. Cela devrait logiquement donner une intrigue linéaire mais celle-ci ne convient aucunement à Argento. Dans inferno, on a au contraire plusieurs personnages qui mènent la danse. Chaque personnage amasse des informations et refile le bébé à quelqu’un d’autre qui est chargé de poursuivre l’intrigue. Cela donne une sorte de structure narrative avec une spirale en pointillé où au fil de l’avancée des personnages, on sent qu’on approche du centre du mystère bien que ceux-ci n’en aient qu’une vision fragmentaire. Cela offre d’ailleurs la certaine originalité d’un personnage principal qui traverse l’histoire sans en comprendre un traître mot. Dommage que la structure intriguant dans la première moitié s’essouffle dans la deuxième. Il faut dire que les défauts finissent par s’agglutiner entre un acteur principal qui est une vraie loque (c’est censé servir le personnage mais c’est juste insupportable), une musique merdique (le classique ça va mais la composition originale est horrible et le sympathique thème est utilisé n’importe comment) et quelques scènes ratées (l’attaque des chats absolument pas convaincante là où celle des rats est franchement éprouvante). L’expérience demeure néanmoins très attachante et a le mérite de m’avoir donné envi de rejeter un œil à suspiria. Voilà qui fera un bon début pour ma prochaine plongée dans la galaxie Argento.

Renny Harlin : le bourrinage est un art de vivre

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Harlin aura quand même bien réussit son coup. Le bonhomme aura tellement réussit à s’intégrer dans l’industrie cinématographique américaine que tout le monde semble oublier qu’il est finlandais d’origine. Du coup, c’est sans honte que je peux lui apposer la caution auteur européen et me lancer dans une rétrospective de son œuvre. Oui bon, c’est vrai aussi que je me foule pas parce qu’avec Harlin, le décryptage thématique y tient pas à grand chose.

12 rounds (2009)

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Voilà le film qui m’a poussé à faire une rétro sur le bonhomme. Parce que 12 rounds m’a rendu triste, très triste. En le voyant, je me dis que le si attachant Renny Harlin est entré dans une nouvelle phase. Depuis une décennie et le bide cumulé l’île aux pirates/au revoir à jamais, Harlin était rentré dans une forme de pétage de plomb. Déjà peu porté sur la subtilité et prenant plaisir à verser dans l’action rentre-dedans dont personne ne se plaindra, Harlin avait complètement largué les amarres en découvrant les possibilités des CGI. Cela a donné plusieurs films complètement ahurissants où il utilisait les pires techniques numériques pour mettre en boîte ses idées dégénérées. Puis ces dernières années, j’ai l’impression qu’Harlin commence un douloureux retour sur terre. C’est comme si il avait compris qu’il n’était plus in et qu’il s’est tellement grillé auprès des studios (et du public en général) qu’il ne risque plus de toucher à un de ces gros budgets sur lesquels il pourrait assouvir pleinement sa passion de l’art bourrin. Parce qu’il faut se rendre à l’évidence : si 12 rounds n’a eu droit qu’à une exploitation express en salle, c’est parce qu’il ne méritait pas plus. En le projetant sur un écran de cinéma, on serait immédiatement saisi par la pauvreté des moyens à disposition. Rien qu’un écran 16/9 de taille convenable montre les limites budgétaires de la chose. Aussi alléchant soit le pitch (un adepte des pièges saw-esque lance un Matt Damon sous testostérone dans une série de travaux herculéens), le film souffre d’un tel manque d’ampleur et de spectaculaire qu’on ne suit l’ensemble qu’avec un ennui poli. Le film aurait besoin de scènes d’action imposantes pour gonfler d’adrénaline son spectateur mais elle n’en a pas les moyens. Harlin tente de faire illusion en s’amusant avec les maigres jouets à disposition (vlan le camion de pompier, baf le tram, boum l’hélicoptère) mais son emballage à la Tony Scott du pauvre n’arrive pas à masquer son manque de motivation face à la pauvreté de la production à disposition. En voyant Harlin tombési bas, j’aurais presque envi de pleurer mais bon, nous ses fans on est pas des tapettes.

Au revoir à jamais (1996)

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Pour oublier le désenchantement de 12 rounds, rien de mieux qu’un retour sur ce qu’on peut aisément considérer comme le dernier vrai bon film du bonhomme. En soit, l’objet est d’autant plus attachant qu’il est également le dernier travail du scénariste Shane Black avant une mise en veille de pratiquement 10 ans. Revoir the long kiss goodnight est d’ailleurs un excellent moyen de reconsidérer tout son talent. Le premier point tient bien sûr au personnage principal. Je m’étais toujours arrêté à son côté femme couillue mais le film arrive à mettre en avant un portrait plus complexe par rapport à la dualité de son personnage (merveilleusement incarné par Geena Davis). Le film n’aurait sûrement pas eu le même impact si le personnage avait été un homme, le caractère féminin apportant une sensibilité plus forte notamment au regard de la thématique sur la maternité. C’est un des aspects forts intéressants du film auquel se rajoute un désamorçage heureux de moult clichés (pas de véritable romance entre les deux personnages principaux, pas de retournement de situation par rapport à la découverte de la paternité de la gamine), des répliques qui claquent (le personnage de Brian Cox, c’est rien que du bonheur... dommage qu’il disparaisse si rapidement) et une structure à la solidité exemplaire (les petits détails introduis à l’avance pour justifier le déroulement de l’action). Pas étonnant qu’outre l’envi de mettre en valeur sa femme, Harlin se soit focalisé sur un tel script pour se reconstruire suite au bide massif de l’île aux pirates. Il offre d’ailleurs le meilleur de lui-même avec une mise en scène carrée et très efficace dopée par la photographie fort appréciable de Guillermo Navarro (le sauvetage de Samuel L. Jackson après la renaissance de l’héroïne me paraît toujours aussi puissant grâce à ses éclairages). Toutefois malgré le sérieux dont il fait preuve, on le sent déjà parfois à 2 doigts de tomber dans la folie filmique que ce soit avec les SFX (les incrustations pour l’explosion finale) ou certaines idées (la version alternative présentée sur le DVD du meurtre sur glace est juste hilarante). Dommage que l’échec au box-office l’ait conduit à franchir le pas pour ses projets suivants. Nul doute que si ce fort sympathique divertissement avait eu du succès, la suite de la carrière d’Harlin aurait été toute autre.

Cliffhanger (1993)

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En le revoyant, je me dis que cliffhanger est la parfaite démonstration de l’art du bourrinage made in Harlin. En effet, l’histoire offre une base assez porteuse avec cette histoire d’affrontement en montagne. Il y a une ironie par rapport à un enjeu (retrouver des valises pleines de biftons avant l’équipe adverse) assez risible au regard de l’environnement naturel qui l’entoure (l’argent compte apparemment plus que la survie pour la plupart des personnages). Un McTiernan n’aurait pas manqué d’exploiter ce ressort narratif. Sauf que c’est pas John aux commandes mais Renny. L’idée attrayante, il l’a gicle en une réplique (“comment on s’enfuit de cette montage même avec du fric ?” déclare un des personnages) et il se concentre sur son étalage d’action et de violence. Cliffhanger devient donc un énorme missile lancé à toute berzingue qui détruit tout sur son passage et ne s’arrête pas sur les détails. C’est l’exemple même de ce si regretté divertissement 90’s où on ne laissait pas 5 minutes s’écouler sans balancer une baston, une fusillade ou une catastrophe en tout genre. En résulte un captivant divertissement sous pression qui pour ne rien gâcher se montre une brillante démonstration de savoir-faire (mise en scène ultra-efficace, joli cinémascope, musique brillante, bon castingde tronche). Le seul truc qui me gène, c’est que je me suis rendu compte à la revoyure que le film contient un certain lot de trucages pas heureux. Il y a bien plein d’incroyables cascades dans le film mais j’ai été désappointé en y rejetant un œil de découvrir qu’un certain nombre de scènes puait le tournage en studio. J’aurais presqueété déçu par ce côté mythe qui s’effondre (je restais persuader jusqu’à présent que le film avait été quasi-intégralement tourné dans des décors naturels) si cliffhanger ne restait pas une œuvre tellement addictive que défauts et qualités s’assimilent avec le même plaisir.

Peur bleue (1999)

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Peur bleue est donc le film qui a vu la naissance du Harlin version 2.0. En même temps, faut le comprendre. Il tente une réactualisation du grand film d’aventures avec plein d’humour et d’action, il se vautre lamentablement la gueule au box-office. Il essaie de livrer un film d’action avec un minimum de profondeur, rebelote. Pas étonnant qu’il en ait marre. Peur bleue aurait pu ainsi être une démonstration pour faire croire qu’il est encore dans le coup. Si il en a l’apparence, il ressemble plus à un gros fuck craché au monde. Il y a un temps il aurait peut-être tenté de faire tenir debout ce jaws à la sauce film catastrophe. Mais maintenant, il en a rien à foutre et il compose n’importe comment avec les ingrédients à disposition. J’ose d’ailleurs toujours pas croire qu’il ait osé dire qu’il était impossible de distinguer les vrais requins des faux. Mais bon, ses animatroniques impressionnants mais fleurant bon le caoutchouc et ses CGI tous pourries font le charme d’une production à la perversité réjouissante. Harlin semble ainsi prendre son pied avec le concept du film catastrophe où les mises à mort doivent valoir lieu d’expiation divine : croquer la main du scientifique qui tenait une cigarette, engloutit le perroquet qui jure à longueur de scène, écarteler ce salopard de millionnaire qui se la ramène avec sa morale à la con, dévorer par l’entrejambe la blondasse (dont on apprend dans une scène coupée qu’elle attend un bébé hors mariage) et, plus fort que tout, gober d’un coup l’héroïne responsable de tout ce bordel. Harlinn’affiche même pas deux secondes de scrupules et annihile en deux temps trois mouvements toutes possibilités d’une fin heureuse avec bisou devant un lever de soleil. Une caution morale complètement grotesque qui participe au côté déviant de l’entreprise. Harlin y se fout de tout et nous aussi. Du coup, c’est sans honte qu’on peut savourer une œuvre délirante où l’exagération (Thomas Jane qui passe tout le film à faire son intéressant, sa panoplie allant de la glissade dans 2 centimètres d’eau au rodéo à dos de requin) et le portnawak (LL Cool J en cuistot intégriste qui a un gros bâton) deviennent carrément de la virtuosité. Un fabuleux plaisir coupable en somme comme peut l’être considéré driven, dernier film de ma rétrospective Harlin qui aura droit à une critique à part pour finir en beauté.

6 février 2011

Critiques en vrac : janvier 2011

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Le meilleur Disney des 20 dernières années ne dure que dix minutes. Profitez-en c’est cadeau

Bon ben, c’est pas encore cette année que j’aurais tenu mes bonnes résolutions. Accaparer par une analyse d’E.T que je peine à finaliser (et l’ambition prenante de me lancer dans un papier sur le chef d’œuvre volte/face), il aura fallu l’avant-première de Tron legacy pour sauver le blog de son inaction. En même temps, c’est pas en zonant sur twitter que les articles vont s’écrire. Faudrait d’ailleurs que je pense à organiser mon temps de manière un peu plus pragmatique pour réussir à ménager des plages propices à l’écriture de chroniques. Mais bon, vu que c’est la période fiscale où les heures supplémentaires ne sont plus comptées (oui pour ceux que ça intéresse, je suis comptable : vous savez le mec qui fait en sorte que la colonne de gauche du bilan soit égale à celle de droite pour pas que de charmants inspecteurs du fisc viennent frapper à votre porte), c’est pas gagné. Mais bon, ça ne m’empêche pas d’y croire. Place maintenant aux films !

5_cm_par_seconde5 cm par seconde de Shinkai Makoto
Grâce au papier de Jehros  et à quelques autres, je me suis piqué de curiosité pour le travail de Makoto. Du coup, lorsque j’ai vu 5 cm par seconde traîné sur l’ordinateur d’un copain, je n’ai pas hésité une seule seconde. Si le copain en question m’a aussi refilé Tekken (ce qui me fait émettre des doutes sur notre amitié), je suis heureux qu’il m’ait permis d’assister à un tel objet. Programme découpé en trois partie, 5 secondes par seconde n’affiche qu’une petite heure au compteur mais quelle heure ! Il s’agit là d’une œuvre à la tristesse terrassante. Un brin désarçonné par un début se passant d’introduction, j’ai rapidement été captivé justement cette brillante gestion du rythme. 5 cm par seconde parle de cette fatalité du temps qui passe et la manière dont il retranscrit le parcours des personnages à coups d’ellipses (les transitions entre les segments) ou au contraire de longues plages contemplatives (l’insoutenable scène du train bloqué par la neige). Le film est traversé ainsi d’une mélancolie puissante magnifiée par des images poétiques (rien que le titre énigmatique donne envi de pleurer lorsqu’on en saisi la signification). Voilà qui me donne très envi de me pencher sur les autres travaux de Shikai et tout particulièrement sa tour au-delà des nuages.

crank_2Hyper tension 2 de Mark Neveldine et Brian Taylor
L’anecdote est connue. Suite au succès du premier crank, les producteurs ont commandés une suite à Neveldine et Taylor. Pas très chaud à l’idée de s’atteler à une nouvelle aventure de Chev Chelios (bien mal en point à la fin du premier opus), les duettistes ont torché le script le plus infâme qui soit. Ils se sont tiraillés les méninges pour trouver les idées les plus dégueulasses possibles de telle manière que leur scénario soit invendable. Quelle ne fut pas leur surprise lorsque les producteurs ont donné leurs approbations sur le manuscrit. Neveldine et Taylor retourne alors complètement leur veste. Si un script aussi trash est accepté par les studios, il faut absolument le tourner. Ce qu’ils ont fait avec leur style hystérique bien à eux (objectivement limité cinématographiquement, fort enthousiasmant sur le moment). Le résultat est un crank 2 dont le mauvais goût et la passion pour les débordements trash débiles atteint des sommets. Crank 2 est l’objet le plus répugnant que nous ait offert un studio hollywoodien depuis bad boys 2. C’est abominable (des plaies béantes crachant gerbes de sang et de silicone), dégradant (sodomie au fusil à pompe), crétin (retour de personnages décédés par les pires manigances scénaristiques possibles), limite pornographique (la scène de sexe de l’hippodrome), régressif (le passage kaiju eiga) mais surtout hallucinant et captivant. Le film va tellement loin dans son attitude de mauvais garçon qu’on atteint une certaine forme de génie. On attend avec impatience chaque scène pour savoir comment les auteurs arriveront à faire encore plus fort dans l’insanité.  Un nouveau palier de décompression dans la dégénérescence a été passé et l’exploit aussi bête soit-il impressionne.

autreL’autre de Robert Mulligan
L’autre fait parti de ce genre d’œuvre qu’il est impossible de découvrir aujourd’hui vierge de toutes connaissances. Dès qu’on veut s’y intéresser, on tombe forcément sur une analyse motivante mais qui malheureusement évente le rebondissement principal du récit. À l’instar de psycho d’Hitchcock, il est donc assez difficile de découvrir le film aujourd’hui sans que son sujet véritable soit connu à l’avance. Dieu que j’aurais voulu subir un lavage de cerveau avant de me lancer dans le visionnage pour pouvoir savourer la progression narrative sans me préoccuper du twist à venir. En l’état, la vision d’un film comme l’autre reste très forte. Je suis fasciné par le regard sans concession que porte Mulligan sur son histoire. C’est probablement l’un des films sur l’enfance le plus malsain qui soit, tant il réussit à capter la cruauté enfantine dans son horreur la plus complète. Le dernier acte vire d’ailleurs à la monstruosité totale, annihilant point par point toutes possibilités d’happy end (le plan final est d’une certaine manière apocalyptique). L’étalage de cette horreur n’a pourtant rien de gratuit et s’inscrit parfaitement dans la description logique d’un esprit tourmenté. Au bout du compte, j’ai un peu de mal à m’en remettre mais c’est clairement d’un très haut niveau et je suis sûr de le réévaluer à la hausse avec le temps. Dans tout les cas, étant donné que c’est ma première incursion dans le cinéma de Mulligan, je suis prêt à d’autres expériences. 

fantasia_2000Fantasia 2000 de Roy Disney
Après la découverte de fantasia, autant prolonger le plaisir avec cette “suite” qui aura globalement mise tout le monde contre elle. Il est vrai qu’il y a de nombreux problèmes dans ce nouvel opus, à commencer par son manque flagrant de poésie. Je crois que les auteurs ont été un peu trop écrasés par leur lourd héritage. Il n’y a qu’à lire/écouter des interviews pour comprendre que l’œuvre originelle est considérée à juste titre comme le saint graal de l’animation. Le premier fantasia était une œuvre expérimentale et incroyablement innovante. Les réalisateurs aux commandes ne semblent pas avoir assez de confiance pour oser véritablement s’attaquer à un tel mastodonte. Du coup, si fantasia est un film de pionniers, fantasia 2000 est un film de suiveurs. Le film flirte ainsi énormément avec l’hommage en favorisant un système d’échos. Donald et l’arche de Noé renvoie à Mickey et l’apprenti sorcier (séquence emblématique reprise d’ailleurs telle quelle ici), le pitch d’ouverture est repris stricto sensu, l’oiseau de feu était la première œuvre de Stravinsky que Disney envisagea d’adapter avant de se rabattre sur le sacre du printemps... De même, fantasia 2000 semble prendre en compte les nombreuses critiques faites à l’œuvre originelle. Si la faible durée du film est justifiée par les contraintes techniques de l’IMAX à l’époque, je pense que le rabaissement de la durée de 120 à 75 minutes est également un choix conscient du fait que la longueur de fantasia a souvent été jugé excessive (le film fut d’ailleurs exploité pendant plusieurs années dans un montage de tout juste une heure). De même, pour contrebalancer le manque d’humour de l’hôte originel, la production se paye tout un tas de guests stars divertissants (politique pas très payante vu le niveau des intervenants). Les ambitions ne sont au bout du compte plus les mêmes. Fantasia était une œuvre contemplative mêlant des illustrations de la mort et de la vie. Fantasia 2000 est une œuvre animée par une incommensurable frénésie créative sous le signe des retrouvailles (thème revenant régulièrement tout le long des sketchs). Pas vraiment expérimental donc, il s’agit plus d’un étalage énergique de savoir-faire. Les animateurs ne repoussent pas particulièrement la maîtrise de leur art mais dévoile toutes leurs compétences en multipliant les images saisissantes et en composant brillamment leurs séquences. Les choix musicaux sont par conséquent plus tonitruants (ce qui n’est pas pour me déplaire) et donne un parfait tempo pour cette avalanche d’imagination. On est loin du degré d’abstraction de fantasia (même la musique absolue se met à raconter une histoire) mais la beauté des séquences reste captivante. Je noterais quand même un peu à part l’oiseau de feu, ultime et magnifique séquence miyazakiesque qui est la seule à se montrer à la mesure de son modèle en faisant de la vitesse un moteur expérimental. Ce passage (que vous pouvez visionner plus haut) est la cerise sur le gâteau d’un divertissement agréable et rondement mené.

hereafterAu-delà de Clint Eastwood
Le dernier cru eastwoodien aura créé un consensus virant à la lapidation. Et j’ai bien envi de le rompre. Car j’en suis le premier surpris mais j’ai beaucoup aimé ce hereafter. Je commençais pourtant sérieusement à m’inquiéter pour Clint Eastwood après ses deux derniers films, le radoteur gran torino (définitivement rien compris à l’accueil dithyrambique qu’il a reçu) et l’académique invictus. Je m’apprêtais donc à constater la mort clinique du réalisateur. Et si il y a bien des défauts, ce qui était censé être un désastre sur pellicule m’aura plutôt convaincu. Bon alors la principale nouveauté dans l’univers d’Eastwood, à savoir le fantastique assumé (celui-ci était présent de manière plus succinct dans l’homme des hautes plaines et minuit dans le jardin du bien et du mal), n’est pas ce qu’il y a de plus réussi. Ses visions de l’au-delà font tristes figures et les séances de spiritisme avec gros bruitage pour marquer la connexion ne sont pas franchement les plus captivantes. Je me suis par contre laissé porter par le travail des personnages. Si il y a un manque d’équilibre flagrant entre elles, les différentes parties axées sur la mort (la partie londonienne où un gamin se repli dans une attitude mortifiante suite au décès de son jumeau), la vie (la partie américaine où un medium cherche à se construire une vie malgré son lien perpétuelle avec la mort) et la renaissance (la partie française où une journaliste doit appréhender le fait qu’elle est morte et ressuscitée) proposent des parcours émotionnels qui touchent juste. Certes dans la filmographie d’Eastwood, tout ça n’est pas bien nouveau et c’est sûrement plus de la réutilisation de savoir-faire qu’un vrai renouvellement. Mais là où le pilotage automatique d’un gran torino ou d’un invictus m’a ennuyé, je suis resté captivé par les pistes explorées par ce hereafter. Sinon, moi aussi je voudrais bien fourrer des trucs dans la bouche de Bryce Dallas Howard. 

arriettyArrietty, le petit monde des chapardeurs de Hiromasa Yonebayashi
Bien plus encore que le royaume des chats et les contes de Terremer, la vision de ce Arrietty m’a bien fait comprendre que le studio Ghibli ne sera définitivement plus le même lorsque Miyazaki aura disparu. Bon le film est loin très mauvais mais l’excellence des œuvres du studio est nivelée vers le bas de manière spectaculaire. Bien que signé par Miyazaki himself, le script m’a incroyablement étonné par une teneur bancal allant même jusqu’à se vautrer dans des défauts que je ne lui soupçonnais pas (la ménagère idiote et moche est méchante... ben parce qu’elle est méchante et qu’il fallait meubler l’intrigue). Le pire est sûrement atteint avec la discussion entre les deux personnages principaux sur l’extinction des espèces. Ça m’a fait le même effet qu’un passage d’avatar où le héros vocifère contre les manigances des puissants sur les faibles dans un esprit très pilier de comptoir. L’instant d’une scène, leurs auteurs passent pour les écolos neuneux que voient certains critiques pas très réveillés. C’était très embarrassant de voir un truc pareil. Ça me fait noircir le tableau d’une œuvre qui reste agréable au demeurant. Il y a eu divertissement moins recommandable que cette œuvre drôle et touchante où le réalisateur exploite habilement la différence d’échelle entre les personnages. Mais le film est plus efficace que poétique, cherchant à aller droit au but plutôt que de véritablement réussir à construire une ambiance particulière. Il n’y a qu’à voir l’introduction servant de transition entre un milieu urbain et la maison de campagne où se situera le reste du film. Avec un Miyazaki à la réal, ça aurait sûrement donné lieu à une belle et mélancolique séquence façon voyage de Chihiro. Ici c’est du pur fonctionnel avec juste un plan appuyé sur un portail pour bien faire comprendre qu’on entre dans un autre univers. Bon allez j’arrête de me torturer et je le reverrais tranquillement sans attente pour pouvoir apprécier ce sympathique moment pour ce qu’il est.   

green_hornetThe green hornet de Michel Gondry
A l’inverse de hereafter, je ne peux malheureusement que rejoindre que l’opinion générale sur la dernière réalisation du génial Michel Gondry. De manière prévisible, je me suis retrouvé devant un spectacle bien formaté même si je ne m’attendais pas tant à ce que le style Gondry soit si dilué. C’est d’autant plus frustrant que par instants, on sent l’inventivité de Michel Gondry reprendre le dessus (la première visite du garage, le split-screen, la séquence où le héros reconstruit les ficelles de l’intrigue). C’est malheureusement trop disparate pour me convaincre. C’est techniquement bien exécuté mais on reste dans l’oubliable tant ça ne sort pas de la masse. Les scènes d’action synthétisent ce grand écart entre défauts de base du blockbuster actuel (montage pas toujours lisible, notamment la poursuite en caisse lors du climax) et les envies de bricolage expérimental de son réalisateur (j’adore le plan où plusieurs doublures sont utilisés afin de décupler la vitesse d’action de Kato). Le film souffre sinon clairement de passer après kick-ass. En comparaison, la déconstruction du super-héros de green hornet apporte peu. Là encore, le côté absurde d’un Gondry aurait pu donner le change mais les meilleures idées (le héros qui se fait passer pour un méchant) ont le malheur de rester au second plan et seuls quelques pics de génie surnagent (le bad guy psychopathe campé par Christopher Walz). C’est donc bien agréable, drôle mais trop timoré pour rester dans les mémoires. Et je ne suis prêt de pardonner le rôle ingrat filé à Edward James Olmos (BSG addict inside).   

chemins_de_la_libert_Les chemins de la liberté de Peter Weir
Avant d’aller voir le dernier film de Weir, j’avais jeté un œil à Gallipoli pour me mettre dans le bain. Il s’agissait là d’un film splendide à la mise en scène sublime arrivant à jouer sur plusieurs registres (film de guerre, récit initiatique, aventure feuilletonesque) pour déboucher sur une conclusion traumatisante. Du grand art que me faisait espérer de grandes choses pour the way back. Mon dieu quelle déception se fut au final. Pourtant, j’avais été complètement éblouie par la bande annonce. Commençant comme un film académique sur l’éloge du courage, ce court montage laissait dévoiler dans sa seconde moitié ce qu’on pouvait soupçonner être le véritable cœur du film. Avec Weir, on voyait donc se profiler une leçon de survie magnifiée par les rapports de l’homme à la nature. Après une poignante scène d’ouverture où les enjeux (espion ou pas ?) sont balayés pour ne laisser place qu’à une émotion dévastatrice, j’ai toutefois commencé à désenchanter avec la partie du goulag. Une première partie mollassonne qui ressemble à une quelconque production hollywoodienne (si on excepte des conditions de tournage apparemment rudes). Bah, je me suis dit que ça allait s’en sortir dès que l’évasion commencerait comme dans la bande annonce. Malheureusement, la suite ne décolle guère plus. Les personnages nous matraquent sur un ton pontifiant leurs états d’âme et la longueur se fait sentir face au manque de lien affectif. Quant aux rapports avec la nature, il est illustré de manière trop sporadique pour réussir à maintenir l’implication. Bon il reste quand même des passages où le génie de Weir arrive à sauver l’entreprise. Quant il se pousse vraiment à exploiter et magnifier ses environnements, la mise en scène offre des choses magnifiques et certains passages sont incroyablement puissants (la fin casse-gueule me fait sortir du film en voulant vraiment l’aimer). En gros, j’ai plus eu l’impression de voir le Weir balourd du cercle des poètes disparus plutôt que celui vivifiant de master and commander.

fire_and_iceTygra, le feu et la glace de Ralph Bakshi
Bof, très bof. Il s’agit là de ma deuxième incursion dans le cinéma de Ralph Bakshi après sa catastrophique adaptation du seigneur des anneaux et je trouve ça toujours aussi déplorable. Fire and ice m’a quand même bien moins ennuyé que ce dernier même si cela tient très sûrement au fait que cette coproduction avec le maître Frank Frazetta ne souffre pas de comparaisons assassines. Il n’y a pas de roman d’origine à massacrer et aucune adaptation plus brillante ne vient parasiter la lecture. Cela dit, ça n’est pas non plus une raison pour être indulgent face à un script minimaliste et sans grand intérêt (capture, libération, ballade dans la jungle, capture, baston, libération... que de variété dans les situations). Je suis de plus très réfractaire à la rotoscopie. Certes plus élaboré que sur le seigneur des anneaux, la technique donne lieu à une “animation” désagréable à l’œil où la fluidité des mouvements se heurte aux incapacités d’interprétation des comédiens (aussi bien pour les expressions faciales que gestuelles). L’interaction laborieuse des personnages avec les décors m’ennuie également au plus au point. La lourdeur du processus m’apparaît d’autant plus idiote qu’elle conduit à une mise en scène restrictive et indigente. A quelques ralentis près, le tout n’est que cadrages approximatifs et peu spectaculaires. Comme le seigneur des anneaux, le film survie uniquement grâce à la certaine beauté de la production design et notamment le travail sur les backgrounds. Les intentions de Bakshi étaient louables de faire un film d’heroic fantasy animé par un pur sentiment de sauvagerie et où les dialogues n’auraient guère leur place. Mais l’entreprise fait preuve de tellement peu d’effort (c’est pas en pompant la BO de jaws que le compositeur allait se faire passer pour Basil Poledouris) que fire and ice n’est guère plus qu’un joli cahier d’images. Ça me décourage de poursuivre la découverte d’autres œuvres de Bakshi qui présentent pourtant tous de si alléchantes promesses. Allez je trouverais bien assez de motivation pour me procurer wizards que Wild Side devrait sortir en DVD fin février. 

universal_soldierUniversal soldier de Roland Emmerich
Jean-Claude tout le monde l’aime. Il est frais, il est sympa et si tu l’emmerde, y règle ça vite fait avec un kick dans ta gueule. Mais bon, Jean-Claude est surtout un athlète qui n’aura pas forcément le long de sa carrière rencontrer les bonnes personnes pour faire de lui un vrai acteur. Parce que bon, notre bon Roland Emmerich y s’en fout un peu que Jean-Claude y puise pas enchaîner plus de deux expressions faciales. Pas grave vu que dans universal soldier, il joue un super soldat déshumanisé qui veut juste rentrer à la maison. Le panel limité de Van Damme se prête bien donc au jeu de cette série B qui malheureusement tend surtout vers le Z. On salue souvent les mérites d’Emmerich pour rentabiliser ses budgets. Si cette capacité du bonhomme peut parfois faire des merveilles (tout particulièrement sur son meilleur film stargate), ça n’est pas vraiment le cas avec universal soldier. Dès la séquence d’ouverture avec son Vietnam reconstitué en studio, ça sent mauvais. Et effectivement, l’ensemble est malheureusement très cheap. Porté par un score minable, le film se fait parfois efficace mais reste globalement peu impressionnant à cause de ses méthodes de tournage économiques. Une limitation de moyen qui n’aide pas à faire décoller cette histoire de robocop militarisée dont les situations souvent ridicules (“cherchez quelque chose de dur” exige un Jean-Claude oilpé à une jolie blondasse) me laissent toujours interrogateur sur le sens de l’humour d’Emmerich. Seule chose à sauver : l’ami Dolph Lundgren qui a une belle présence en bad guy et bouffe sans problème Van Damme malgré un temps de présence plus restreint.

30 janvier 2011

Tron l'héritage

tron_legacyTitre original : Tron legacy
Genre : fucking biblical
Réalisation : Joseph Kosinski
Scénario : Edward Kitsis et Adam Horowitz
Casting : Jeff Bridges, Garrett Hedlund et Olivia Wilde
Photographie : Claudio Miranda
Musique : Daft Punk
Durée : 2H05
Sortie : 09/02/2011
Note : 8/10

Sam Flynn, 27 ans, est le fils expert en technologie de Kevin Flynn. Cherchant à percer le mystère de la disparition de son père, il se retrouve aspiré dans ce même monde de programmes redoutables et de jeux mortels où vit son père depuis 25 ans. Avec la fidèle confidente de Kevin, père et fils s'engagent dans un voyage où la mort guette, à travers un cyber univers époustouflant visuellement, devenu plus avancé technologiquement et plus dangereux que jamais...

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Il est intéressant de se rendre compte que les films utilisant les technologies les plus avancées ont des sujets paradoxalement tournés vers le passé. Par exemple, jurassic park ressuscite un monde préhistorique par la grâce du CGI ou avatar emploie la révolution de la performance capture pour conter une histoire appelant à renouer avec la nature. “Conter” c’est là toute la différence entre ces films et leurs successeurs souvent d’une grande banalité. Ces films ont réussis à intégrer la technologie comme un moyen d’expression de leurs thématiques. La simplicité des histoires choisies n’a rien à voir avec une facilité mais cherche à démontrer la manière dont une nouvelle forme d’expression peut transcender et donner tout son poids à l’histoire la plus traditionnelle. On peut même dire qu’on arrive grâce à elle à obtenir un nouveau degré de réflexion dessus. La technologie du futur nous permet finalement de comprendre notre passé. En son temps, Tron l’avait bien compris. Intégrant à l’histoire son ambition de création d’un monde numérique (ce qui lui permet d’ailleurs de survivre à l’épreuve du temps), le film faisait pourtant revivre des figures qui avait plus à voir avec la fantasy moyenâgeuse que la pure science-fiction. Dans un univers sous le joug d’une puissance maléfique, on découvrait ainsi des personnages assurant des fonctions telles que guerriers (Tron, unique programme capable d’annihiler le Master Control), magiciens (le concepteur pouvant influer sur la matière informatique) ou vil bras droit obsessionnel (le redoutable Sark). A cela se rajouter bien sûr une illustration des jeux vidéo renvoyant aux combats d’arène de la Rome antique. Un regard futuriste vers des archétypes passés en somme et une position que Tron legacy est loin de renier.

Ceux qui espéraient une histoire complexe de la part de cette suite tardive en auront pour leurs frais. Car Tron legacy nous offre l’histoire la plus connue du monde : la lutte du bien contre le mal. Basique ? Simplissime ? Foutage de gueule ? Que nenni puisque notre histoire nous renvoie à des connotations bibliques lui donnant toute son envergure. Kevin Flynn est ainsi désormais ni plus ni moins que Dieu. Par sa connaissance informatique, il est devenu le créateur d’un tout nouveau monde. Pour le rendre le plus parfait possible, il s’invente un fidèle bras droit à son image nommé CLU. Celui-ci l’aide dans sa tâche jusqu’à l’apparition d’une nouvelle forme de vie dans ce monde. Flynn n’a qu’admiration pour celle-ci alors que CLU n’y voit que des êtres imparfaits qui n’ont pas leur place dans la perfection réclamée par son créateur. Il se rebelle donc contre ce dernier et jure d’annihiler cette inacceptable source de satisfaction. En terme d’enjeux et de rapports de force, nous sommes ni plus ni moins que devant le conflit entre Dieu et son âme damnée, le diable.

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Du plus fidèle allié est né l’ennemi juré à cause d’une différence de point de vu sur le même objectif. En ce sens, CLU utilise les mêmes armes que le diable : la manipulation des enfants du créateur. Il détourne ainsi l’attention des programmes par ses spectaculaires jeux d’arène et en formate d’autres pour les faire rejoindre sa cause. Lors de leur première rencontre, il n’hésite d’ailleurs pas à se faire passer devant le héros pour son père. Bien sûr, l’idée du fils de Dieu qui débarque dans ce monde et devra en assurer son salut en le traversant jusqu’à rejoindre l’autre ajoute à la dimension biblique du film. À cela, on pourrait rajouter des notions plus bouddhistes non moins négligeable. Cela se note tout particulièrement dans le comportement de Kevin Flynn. En prêchant l’inaction face à l’ennemi (il est convaincu qu’un simili karma conduira à la perte de CLU) ou en reconnaissant l’impossibilité de la perfection (lui-même et CLU sont l’illustration que le bien et le mal ne peuvent exister l’un sans l’autre), il exploite certains préceptes de la théorie du juste milieu. Peut-être pas rien si le réalisateur choisit pour sa réapparition dans le récit de le dévoiler dans la position du lotus.

Cette captivante portée spirituelle rendue d’autant plus forte par son télescopage dans un univers atypique est toutefois contrecarrée par les difficultés à laisser s’y développer une dimension humaine. La mythologie a une structure tellement dense et lourde de sens que les personnages peinent à s’y épanouir. Du coup, malgré de bonnes idées, le script ne tire pas le meilleur parti de ses caractères. La fascination de Quorra pour l’au-delà est ainsi rapidement expédiée n’arrivant à octroyer qu’une touchante image finale. Quant au rapport de Sam Flynn et son père, on aurait aussi voulu quelque chose de plus poussé notamment par rapport au double rôle de Jeff Bridges (tour de force qui conduit à l’un des rares effets CGI mitigés du film). Lors du climax, Kevin n’hésite pas à foutre quelques gnons dans la gueule de CLU. Si il a réussi au cours du film à se réconcilier avec la figure du père bienveillant, il ne voue finalement que haine pour sa volonté obsessionnelle de créer un autre monde. Cette volonté a conduit son père à l’abandonner et s’incarne toute entière dans CLU. La confrontation aurait pu avoir ainsi une vraie portée émotionnelle mais l’exploitation de cette dualité a été tellement peu planifiée tout au long de l’intrigue qu’il n’y a pas grand-chose qui ressort. Le réalisateur Joseph Kosinski démontre plus que jamais son manque de maîtrise sur les sentiments de ses personnages lorsque dans ce même climax, il nous sort des flashbacks de fort mauvais aloi.

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Mais on peut bien lui pardonner. Après tout, c’est un premier long et pas le plus simple à mettre en boîte (vous en connaissez beaucoup des jeunots à qui ont filent des grosses productions à 150 millions de dollars pour leurs débuts ?). On peut comprendre qu’il est dû se concentrer plus particulièrement sur sa technique pour illustrer l’univers si particulier de Tron. Car après tout, il y avait un lourd challenge. Le film originel avait réussit à faire accepter les formes basiques des éléments numériques par la justification d’un univers informatique. L’argument est aujourd’hui dépassé et le film ne pouvait se contenter de construction d’un tel acabit. Pour autant, il ne fallait pas renier la chartre graphique précédemment établi. Les connaissances de Kosinski en matière d’architecture ont dû être fort utiles à cet effet. L’esthétisme contient ainsi toujours cette idée de lignes géométriques claires et précises mais s’inscrivant désormais dans une optique architecturale plus complexe. Dopé par des effets spéciaux nickels, le résultat est du plus bel effet avec des choix de textures alléchants (les arènes en verre construites sur plusieurs niveaux) et une mise en scène habile pour en exploiter la composition. Une qualité se retrouvant tout particulièrement dans les scènes d’action comme dans cette mémorable bataille aérienne.

Avec sa musique qui finie par devenir hypnotisant (peu appréhendable à la première écoute, on en saisie la puissance au fil des écoutes), Tron legacy scotche par son côté impressionnant culturellement et esthétiquement parlant. On regrettera juste que le script n’arrive pas à relier pleinement sa mythologie avec une dimension humaine capable de la déconstruire. Mais bon, n’est pas Cameron qui veut.

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29 janvier 2011

Tron

tronTitre original : Tron
Genre : la technologie du futur des années 80 d’hier
Réalisation : Steven Lisberger
Scénario : Steven Lisberger
Avec Jeff Bridges, Bruce Boxleitner et David Warner
Photographie : Bruce Logan
Musique : Wendy Carlos
Durée : 1H36
Sortie : 08/12/1982
Note : 7.5/10

Flynn, ex-programmeur informatique aigri, est vite devenu une star des salles de jeu. Ça tombe plutôt bien, car son ex-boss, soucieux de protéger un secret, se sert un beau jour d'un prototype expérimental pour dématérialiser le pauvre Flynn et l'envoyer à l'intérieur du système informatique de l'entreprise, où il ne devra son salut qu'à sa dextérité aux jeux vidéo...

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Le problème avec la technologie, c’est qu’elle évolue trop rapidement. On a beau acheter l’objet le plus high tech qui soit, il est pratiquement qualifié d’obsolète juste après qu’on l’ait sortit de sa boîte. Il suffit d’un moment de relâchement pour que sans qu’on ait eu le temps de dire ouf, on se retrouve dépassé par toutes les nouveautés. Comme le disait le producteur Jeffrey Katzenberg à l’époque de Shrek : “Nous vous offrons le top de la technique... pour les dix prochaines minutes”. L’innovation technique est tellement constante que ça en devient assommant. Du coup, il apparaît parfois difficile de jauger les œuvres pionnières. Mettant en avant des techniques aujourd’hui utilisées de manière habituelle, il n’est guère aisé de porter un jugement sur des longs-métrages particulièrement novateurs. Ces derniers exploraient des territoires insoupçonnés à tâtons, ne sachant pas foncièrement ce qu’ils allaient obtenir. En résulte, une maladresse désormais obligatoirement évidente et qui prête à la moquerie. Pourtant, il paraît injuste de minimiser l’importance de ces films à cause des effets de l’âge. Leur portée visionnaire reste fondamentale et mérite toujours toute notre estime par rapport à leur impact sur le cinéma. Tron fait partie de ceux-là.

Au début des années 80, le studio Disney est en pleine transition. A cause d’un succès moins en moins présent, il y a une véritable bataille interne entre les vieux conservateurs et les jeunes loups. Ces derniers souhaitent booster un tantinet le studio en misant sur des productions plus matures, plus orientées vers un public adulte. Profitant de cette nouvelle politique, Steven Lisberger leur soumet le projet de Tron. La particularité du projet ? Il désire animer une grande partie du film avec des ordinateurs. La technologie des ordinateurs n’en est qu’à ses balbutiements mais Lisberger sent qu’il y a là un sérieux potentiel pour l’industrie cinématographique. Force d’admettre que l’avenir lui donnera raison. Mais pour l’époque, ça n’est pas une mince affaire. Emballé par le projet, Disney confiera à Lisberger un budget quasi-illimité qui ne sera pas de trop. L’atelier de Lisberger n’étant absolument pas suffisant pour concevoir toutes les images du film, la production répartira les tâches entre plusieurs boîtes de programmation éparpillées à travers le monde. Lisberger devra de plus composer avec les limites technologiques de certains de ces collaborateurs comme la société MAGI qui ne peut concevoir des objets qu’à partir de formes géométriques prédéterminées.

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Un sacré challenge donc mais qui s’avère en soit bénéfique. Réclamant une motivation de fer, la production du film demanda à tous ses participants de donner le meilleur d’eux-mêmes. Tous ont du y mettre du sien : du réalisateur chargé de s’assurer de l’homogénéité du produit final (guère aisé vu la multitude de sources de données) aux programmateurs chargés de saisir à la main les lignes de code (on dénote pas moins de 600 chiffres pour 4 secondes de film !) en passant par les acteurs obligés de jouer dans des ridicules costumes en plastique face à des écrans noirs (l’acteur Peter O’Toole a d’ailleurs refusé le projet lorsqu’on lui a appris qu’aucun décor ne serait construit). Le résultat en vaut la chandelle puisqu’on peut toujours regarder avec un émerveillement certain le film. Certes la qualité des images générées par ordinateur peut être considéré comme minimaliste, le rendu proposé se hissant tout juste au niveau des animatiques du cinéma actuel. Mais finalement, tout ceci apparaît en accord avec le scénario. Prenant place dans un univers informatique, il est tout à fait normal que l’univers soit constitué de formes rigides aux textures uniformes dépouillées.

Il s’agit d’ailleurs là de la force maîtresse du long-métrage d’avoir fait de son support visuel le sujet du film. Si on passera sur des propos informatiques légèrement datés (le coup du laser reste une joyeuse fantaisie exploitant les maigres connaissances du spectateur en la matière), le film offre un fond des plus pertinents. Outre son message sur la politique informatique de l’époque (la peur des petits concepteurs de se faire déposséder de leurs créations par les grands consortiums), c’est définitivement la création de son univers informatique qui rend toujours aussi fascinant le film. En inventant un monde au sein des ordinateurs, Lisberger anticipait la folie internet jusqu’à son fonctionnement même comme le principe des avatars (les programmes sont interprétés par les mêmes acteurs que leurs utilisateurs). Il invente ainsi un univers fascinant qui malgré son envergure cybernétique reste attaché à un régime plutôt féodal propice à exploiter des pistes narratives plus proches de fantasy que de la SF. L’originalité règne donc en mettre dans ce script transposant les éléments du réel dans ceux du virtuel.

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Une fascination renforcée par l’utilisation jouissive que Lisberger fait de son matériau. Épaulé par un story-board entièrement supervisé par le dessinateur Moebius, Tron regorge de passages phénoménaux. Découvrant que le numérique offre une liberté de mouvement bien plus importante qu’avec les techniques traditionnelles (la caméra peut sans problème se fondre à travers les personnages et objets), l’équipe exploite cette révélation pour rendre le plus spectaculaire et titanesque possible les nombreuses idées du script. En résulte une jubilation de tous les instants au travers de séquences plus immersives les unes que les autres. On aura beau critiquer les problèmes de l’époque en terme de vitesse et surtout de fluidité des mouvements, c’est sans importance face à l’enthousiasme que provoque pratiquement l’intégralité des scènes animées. Encore aujourd’hui il est d’ailleurs difficile de trouver plus jubilatoire que ces phénoménales courses de moto...

Alors oui Tron a vieillit, oui ça fait parfois bobo aux yeux, oui c’est pas exempt de défauts (Jeff Bridges est en très petite forme)... Mais Tron reste une œuvre puissante où l’imagination et la technologie se lie avec une rare harmonie.

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3 janvier 2011

critiques en vrac : décembre 2010

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Ah quelle fin d’année nous avons eu avec son lot de bonheur et de malheur. Qu’est-ce que je dois mettre en avant pour l’habituel courte intro expéditive. Dois-je m’exprimer sur la jouissance que m’a procuré la vision de la bande annonce du tree of life de Terrence Malick ? Si la question du mariage entre le drame et l’évolution de notre planète laisse encore plein d’interrogations (quoique après tout Malick étudie la question depuis ses débuts), cette poignée d’image sublimes parfaitement montées suffit à laisser croire que 2011 contiendra au moins un chef d’œuvre ultime. Mais cette joie peut-elle résister à ma peine à l’annonce de la disparition de Jean Rollin ? C’est un monument français si on peut dire qui nous a quitté et je suis triste qu’il soit disparu alors que je découvrais le pouvoir de fascination de ses œuvres (voir plus bas). Bonheur et mélancolie se mêlent et c’est ainsi que vont les choses. Quel plaisir nous réserve la future année ? Quelles tragédies risquons nous de rencontrer ? Je ne sais pas et c’est cette incertitude qui me fais vous souhaiter à tous une très bonne année quoi qui vous attendent. Il est maintenant temps de tirer un rideau définitif sur l’année passée. Et comme je suis généreux suite aux fêtes (à moins que ce soit encore les vagues échos de mes dérives éthyliques), ce sont non pas 10 mais 12 films qui vont être passés au crible.   

matins_mondeTous les matins du monde de Alain Corneau
Quoi de mieux pour finir l’année qu’un film traitant du grand mystère de l’art qui nous fascine tant ? Quel choc fut ce tous les matins du monde. Jusqu’à présent, je n’étais guère friand du travail d’Alain Corneau. Bon il y avait peut-être de la mauvaise volonté là-dedans puisque je ne m’étais arrêté que sur ses opus les moins reluisants tel le gerbant deuxième souffle ou le pathétique prince du Pacifique. Malgré la sympathie qu’aura su me susciter stupeur et tremblements et surtout police python 357, je n’ai jamais franchit le pas. Il aura donc fallu le décès du réalisateur pour que je puisse m’intéresser à ses œuvres les plus recommandables. J’ai ainsi pu savourer ce mois-ci l’implacable série noire, belle mécanique dominée par un Patrick Dewaere épatant même si je m’avoue un peu déçu par un certain passéisme de la mise en scène. En même temps, cela est logique vu que Corneau se réclame de l’école d’Howard Hawks où il ne faut pas sentir le poids de la caméra (jamais rien compris à cet argument mais après tout, y en a qui ne jure que par ça). Un choix qui si il me laisse dubitatif sur un film comme série noire va complètement m’époustoufler sur tous les matins du monde. Car si Corneau remontait la pente dans mon estime, je ne m’attendais pas à une ascension si fulgurante avec ce film. Ici les choix de Corneau s’avèrent incroyablement payants et captivent de bout en bout. M’étant procuré pour l’occasion son autobiographie, Corneau avouait dans le chapitre consacré qu’il s’était mis à paniquer à la moitié du tournage par rapport à ce que le film risquait de donner au final. Il aura fallu le soutien du directeur de la photographie (tu ne fais pas ceinture-bretelles) pour que Corneau maintienne son cap de bout en bout. Cela est on ne peut mieux puisque c’est par ses méthodes de réalisation que le film atteint un certain statut de grâce. L’économie de dialogues, la direction d’acteur misant sur l’intensité interne des émotions et les cadrages fixes magnifiquement composés pour dépeindre cette intensité sont de merveilleux artifices afin de réussir à toucher ce grand mystère de l’art dont il est question tout le long du film. Tous les matins du monde aurait pu aisément se faire mortifiant par cette orientation. Il est juste fascinant parce que ces méthodes parfaitement assimilées (aucune impression de longueur ne se fait sentir) permettent de toucher au plus près et de manière puissante ce si impalpable questionnement. Juste extraordinaire.

FANTASIAFantasia de Walt Disney (okay il est pas le réalisateur mais c’est tout comme)
J’attendais avec impatience de me jeter dans l’œuvre la plus expérimentale produite par Disney. Et malgré la fatigue et mon goût limité pour la musique classique (j’ai toujours l’impression que sur la durée, ça vire à la cacophonie sans nuance), fantasia a été un enchantement. Forcément, l’exigence du projet tranche tellement avec le divertissement si cher à Disney qu’il est assez normal que le film ne rencontrera pas un grand succès à sa sortie et se traîne encore aujourd’hui une réputation de dessin animé ennuyeux (je crois que gamin on a tous eu des conversations avec nos camarades pour dire que c’était bien chiant). A le revoir avec un œil d’adulte, on peut savourer les choix d’une production à la cohérence captivante. La musique a toujours eu une place importante dans les films d’animation du studio et fantasia semble une parfaite jonction entre les deux arts. Les animateurs s’inspireront de la musique pour mettre en œuvre leurs visions graphiques mais ces visions vont en retour donner leur sens à la partition. Le résultat est une synchronisation artistique complète. Débarrassé de toutes nécessités narratives (la production se couvrira quand même avec les introductions du chef d’orchestre avant chaque segments), fantasia déploie ses illustrations abstraites chargées de retranscrire l’impalpable. Le film ne ménage d’ailleurs pas son spectateur en le soumettant d’office à ce qu’il nomme la musique absolue dotée d’une forme de retranscription bien plus radicale que tout ce qui suivra. Mais bon après tout, cela pose immédiatement l’ambition d’un projet cherchant à matérialiser la musique comme aucune autre comédie musicale ne pourrait le faire. L’animation atteint ici des sommets avec ses passages allant toujours plus loin dans la technique pour toucher au sublime. Pas étonnant qu’on retrouvera au fil des années, une quantité astronomique de récupération de l’imagerie de l’œuvre (l’olympe dans Hercule est complètement calqué sur celui de fantasia, Don Bluth a du se souvenir du sacre du printemps avant d’attaquer the land before time et de casse-noisette pour la scène de danse de Poucelina). Si il me faudra sûrement revoir certains passages pour en apprécier toutes leurs portées (un peu claqué lorsque est arrivé une nuit sur le mont chauve qui est quand même sacrément dingue), ce fut un excellent moment.

lac_morts_vivantsLe lac des morts-vivants de Jean Rollin
Les coïncidences sont cruelles. Quelques jours avant le décès de Jean Rollin, je venais de découvrir son lac des morts vivants sur lequel je salivais depuis déjà bien des années. Voilà qui a amplifié le choc de sa disparition car une fois n’est pas coutume, le film est à la hauteur de sa réputation. J’avais déjà été stupéfait par le travail de Rollin sur la fiancée de Dracula. Et là encore, le bonhomme m’épate. Mettons quelque chose au clair : Rollin n’est pas un cinéaste médiocre. Il est au-delà de ça. Il est un artiste de la médiocrité. Bien qu’il s’agisse d’une commande sur lequel il a débarqué la veille du tournage, le lac des morts vivants est d’une conception tellement abracadabrantesque qu’elle ne peut que résulter d’un choix du réalisateur. Rollin semble prendre un véritable plaisir à étirer, rallonger, éterniser ses effets effrayants et sentimentalistes ne faisant ainsi que ressortir la stupidité de ces scènes. On peut trouver que cela donne un tour ennuyeux à l’objet mais je trouve au contraire que cette manière de s’arrêter longuement sur chaque passage permet d’en extraire l’ultime essence de la nullité. On a ainsi tout lieu de savourer la médiocrité des effets spéciaux (les scènes sous-marines filmées dans une piscine municipale dont on voit les rebords, sans parler des multiples spots de lumière censés imiter le soleil), des acteurs (j’ai un faible pour le gros moustachu avec son doublage nasillard et le blondinet nazi qui ballade un regard perpétuel de junkie), des répliques (vous ne vous rendez pas compte... on commence à murmurer en ville !, ça n’est pas le lac des maudits qu’il faut l’appeler mais le lac maudit des maudits ! et of course l’incontournable PROMIZOULIN !!!) et des situations (le cadavre qu’on transporte dramatiquement à travers toute la ville au son des cloches de l’église pour finalement le laisser traîner devant la porte du maire comme un morceau de bidoche ou tous ses prétextes pour montrer des demoiselles avec la foufoune à l’air). Du grand art dans son genre ! Tu vas nous manquer mon Jean.   

dragon_lac_feuLe dragon du lac de feu de Matthew Robbins
Je dois dire que je prend plaisir ces derniers temps à me replonger dans les long-métrages live produits par Disney dans les 80’s. Après la découverte du fabuleux return to Oz de Walter Murch il y a quelques mois, j’étais impatient de me concentrer sur ce prétendument si noir dragonslayer. Et effectivement, c’est un film très impressionnant et très loin de se conformer à une formule Disney traditionnel. Si le film a des influences, c’est plus du côté d’Excalibur de John Boorman et de la chair et le sang du hollandais fou. On retrouve une approche similaire du milieu médiéval où la magie et le fantastique sont anéantis par la foi chrétienne et où la raison des puissants justifie les barbaries les plus abominables. Matthew Robbins traduit habilement cela visuellement par une réalisation d’une rudesse implacable. Il n’idéalise jamais son univers et le présente constamment comme un endroit sale, menaçant et dangereux. La musique à la fois agressive et captivante d’Alex North rend d’autant plus forte l’expérience. Et que dire de ce fameux dragon, créature tétanisante dont on aura de multiples occasions de voir l’horrifiante puissante. Il y a bien quelques cafouillages dans l’écriture (l’issu du combat entre le héros et le dragon abusant des bienfaits de l’ellipse) et des détails difficiles explicables (après Taram et le chaudron magique, je me demande si Disney essayait à l’époque de construire une thématique sur l’attirance des princesses pour les oubliettes humides) mais dans l’ensemble, dragonslayer est un formidable et magnifique film s‘aventure. Prochaine étape : la foire des ténèbres de Jack Clayton... enfin ça c’est si il existe un DVD français, ce dont je doute.

Scott_Pilgrim_vs_the_worldScott Pilgrim vs the world d’Edgar Wright
Alors que la carrière de Simon Pegg sans son comparse Edgar Wright frise le désastre (si vous avez rit devant un anglais à New York, c’est que vous avez un gros problème), ce dernier nous gratifie ici d’un retour qu’on aurait bien voulu plus retentissant. Vu la sortie sacrifiée et une promotion quasi-inexistante (pas une seule fois je n’ai vu la bande annonce projeté en salle), il serait normal de passer à côté de Scott Pilgrim vs the world. Que c’est triste pour l’un des films les plus jubilatoires de cette fin d’année.  Je ne connaissais pas le comic de base et je me suis pris dans la gueule deux heures de maîtrise cinématographique totale. Il faut dire que j’apprécie d’autant plus la manière dont le film dynamite le carcan de la comédie dramatique indépendante US, genre trop souvent superficiel et faux cul. En l’occurrence, Scott Pilgrim vs the world a une histoire qui joue dans le même registre : un garçon rencontre une fille, en tombe amoureux et va se morfler le passif existentio-romantique de celle-ci entre spleen et humour. Le fait d’avoir pris Michael Cera et sa mono-interprétation n’est qu’un signe encore plus évident de ce gigantesque détournement. A la forme attendu avec sa fraîcheur sentant le renfermé, Edgar Wright injecte tout ce qu’il peut contenir de sous-culture (les arts martiaux, les jeux vidéos, le sitcom et même bollywood y passe). Une réinjection jouissive mais toujours parfaitement assimilée. Dire que le film est aussi superficiel que les modèles qu’il démonte est une grossière erreur tant Wright arrive à adapter ses idées à la nécessité de conter une histoire. Cela donne lieu à une efficacité de narration et de mise en scène assez exceptionnel (voir par exemple le montage chargé d’illustrer la perturbation de Scott après sa rencontre avec Ramona). Il n’en fallait pas moins pour gérer une histoire qui mine de rien fait la part belle à la complexité des émotions humaines. Selon les divers stades d’évolution de l’histoire, les personnages apparaissent loin d’être sympathiques (la relation entre Scott et sa copine chinoise sert surtout au départ à flatter son ego, le passif de Ramona envers ses ex diaboliques montre qu’elle n’est pas complètement innocente à la haine que ceux-ci peuvent lui porter). Il y a tellement à décortiquer que ça en fait définitivement trop pour une seule vision et je m’y replongerais plus tard en BD avec une joie non dissimulée.

passagerLe passager de la pluie de René Clément
Le passager de la pluie est apparemment un cas qui partage dans la filmographie de Clément. Je dois dire que si je partais déjà avec quelques craintes (avec Sébastien Japrisot au script, je m’attendais à une catastrophe façon l’été meurtrier). Craintes qui se sont plus ou moins confirmées avec la première partie. Malgré la citation issue d’Alice au pays des merveilles ouvrant le film, j’ai été très désarçonné par le côté étrange de l’entreprise. Mais le temps de s’y faire, j’ai pris énormément de plaisir par la suite. Au fur et à mesure qu’il avance, le film met de manière de plus en plus apparente le mariage du polar avec l’univers de Lewis Carroll. Le résultat prend ainsi un tour absurde que ce soit dans les échanges entre Marlène Jobert et Charles Bronson ou la caractérisation de leurs personnages. Jobert adopte ainsi clairement l’attitude d’un enfant immature et buté (ce qui justifie en soit le fait qu’elle ne contacte pas la police après son viol) alors que Bronson s’apparenterait au chat de Chesnire, être omniscient dont on se demande perpétuellement si il est là pour aider ou embrouiller l’héroïne. Et puis bon, lorsque l’héroïne débarque dans le palais d’une reine rouge où retentit un “qu’on lui coupe la tête !”, il n’y a plus à douter que Clément recherchait plus les explorations des mécanismes de l’absurde que la solidité d’un récit policier (l’intrigue est de toute façon trop rocambolesque pour ne prendre en compte qu’un seul niveau de lecture). Au niveau de sa mise en scène, pas de surprise donc avec plein d’idées souvent fort réussies pour traduire visuellement l’état d’esprit des personnages (j’aime notamment la belle conclusion de la scène de reconstitution sur la plage, symbolisant le rejet de la part enfantine de l’héroïne). C’est le genre de film qui gagnera très sûrement à être réexplorer avec le temps.

disciplesLes disciples de la 36ème chambre de Chia-Liang Lu
Des quelques films de la Shaw Brothers que j’ai vu, la 36ème chambre de shaolin se distingue tout particulièrement. Je prend un plaisir fou d’assister à l’entraînement de Gordon Liu aux arts martiaux à travers des épreuves masochistes plus réjouissantes les unes que les autres. Je craignais toutefois un aspect redite sur les sequels. Même si les films arriveraient à concevoir de nouvelles épreuves inventives, je doutais d’y trouver le même intérêt que sur l’opus originel. Surprise, les disciples de la 36ème chambre arrive à renouveller sa formule pour se démarquer du premier film. Gordon Liu est mis en retrait et on suit à la place un personnage prétentieux dont la maîtrise des arts martiaux n’a pas besoin de se développer au fil du long-métrage. Peu de scènes d’entrainement donc (une poignée qui forcément trouveront leur utilité au final) mais le film fait quand même la part belle aux démonstrations athlétiques stupéfiantes. Bien partagé entre un humour pas trop lourd et des scènes d’action homériques (mention à la jubilatoire et gigantesque mêlée finale où le style percutant et lisible de Chia-Lang Lu fait des merveilles), les disciples de la 36ème chambre se fait au bout du compte un divertissement extrèmement sympathique. La seule ombre au tableau est un acteur principal qui est loin d’avoir le charisme de Gordon Liu mais bon, on ne peut pas tout avoir. Et c’est toujours mieux que le très faiblard retour à la 36ème chambre, épisode allourdi par des acteurs déplorables, un humour indigeste et une histoire sponsorisée par lutte ouvrière des plus infamantes.

ladyhawkeLadyhawke de Richard Donner
La jolie légende, la magnifique affiche et le souvenir d’une époque où Richard Donner savait faire de sacrément bons films me rendaient d’autant plus excité à l’idée de m’aventurer vers ce ladyhawke. Je dois pourtant reconnaître une certaine déception au vu du résultat final. J’ai été pourtant très séduit par le visuel du film. La production a reconstituée un très bel univers médiéval et Richard Donner prend plaisir à l’illustrer à travers des compositions de plans iconiques. La magnifique photographie de Vittorio Storaro est la cerise sur le gâteau. Je suis toutefois très circonspect sur le script. L’histoire avec sa romance impossible est donc très belle mais la gestion des personnages m’apparaît fort poussive dans l’exploitation. Le trio vedette Broderick/Hauer/Pfeiffer apporte tout ce qu’il faut à leurs personnages mais ne compense pas une écriture bancale où leurs rapports manquent d’une véritable puissance émotionnelle. Je regrette notamment le manque d'exploitation du personnage de Broderick dans sa fonction de pont entre les amants maudits. Faut dire en plus qu’il est difficile de rentrer complètement dans le film à cause de cette abominable musique. Ce n’est pas la première fois qu’un film tente le décalage sonore mais l’utilisation des synthés est tellement horrible ici que ça en fait saigner les tympans. Qu’un type ait pu composer un truc pareil, le faire approuver par les producteurs et passer l’épreuve des projection-tests me dépasse complètement. Cela ne fait que rajouter au bilan mitigé d’un film qui aurait pu être si sympathique.

bartokBartok le magnifique de Don Bluth et Gary Goldman
Quelques avis m’avaient mis la puce à l’oreille sur ce DTV qui n’avait pas grand-chose pour m’attirer. Le film m’apparaît même détestable au premier abord. Voir Don Bluth s’abaisser à mettre en boîte un produit dérivé d’une de ses œuvres (une première pour lui si je ne m’abuse) est déjà attristant en soit. Quand en plus, le film se concentre sur le très dispensable sidekick animalier d’Anastasia, la catastrophe semble inévitable. Et pourtant, Bartok le magnifique se montre très potable pour un produit de ce calibre. Forcément, les moyens sont moindres (bye bye le cinémascope, bonjour le 4/3 des familles) et le ton se fait beaucoup plus enfantin (ce qui paradoxalement rend plus acceptable le si déplacé cocktail fantastico-historique d’Anastasia). Mais Bluth reste ce qu’il est et malgré le rabaissement de ses ambitions, son Bartok n’est pas un objet si inoffensif que ça. Derrière une animation limitée, le film cache donc des recherches graphiques des plus alléchantes construisant un monde de magie relativement inquiétant d’où ressort de belles trouvailles. Outre des constructions métalliques tortueuses, je retiendrais notamment le magnifique crâne géant parlant (qui pour ne rien gâcher est doublé par Tim Curry en VO). De même, la construction narrative balisé (introduction des personnages, quêtes d’objet divers et grosse bataille finale) n’empêche pas Bluth de manier avec dextérité humour (l’attachante Piloff) et un soupçon d’émotion (le sort de la sorcière). Si l’imposante grandeur d’Anastasia a été sacrifiée, il reste quand même en ce Bartok un film d’animation fort amusant qui mérite bien le coup d’œil.

touristThe tourist de Florian Henckel Von Donnersmarck
Alors là je pige pas trop la finalité de ce remake. Non parce que si l’idée c’était de faire une production hollywoodienne qui ressemble à un téléfilm, le plaisant film de Jérôme Salle suffisait amplement. En dépit d’un effort de mondialisation assez épatant (résumons, il s’agit du remake d’un film français par un major américain avec un réalisateur allemand et dont l’action a été transposée à Venise), the tourist brille par son exécution d’une banalité confortable. Agréable à suivre même si on a vu l’original, le film souffre d’un “visuel chic” qui n’est pourtant pas à la mesure du degré d’éclat attendu pour une telle réinvestiture. Anthony Zimmer composait avec ses moyens pour offrir une mise en scène classieuse assez attrayante. The tourist arrive à peine au même résultat avec un budget qu’on peut soupçonner plus conséquent. Saupoudré de fautes de goût assez incroyables (la poursuite en bateau aussi palpitante que du Derrick), le remake a surtout le mérite d’offrir un casting assez sympathique. Je ne pense pas tant au couple Jolie/Depp qu’à des seconds rôles aussi prestigieux que sous-exploités que ce soit Timothy Dalton ou Rufus Sewell qui fait ni plus ni moins qu’un figurant. Du talent gâché en gros, ce qui résume assez bien l’état de ce tourist.

narnia_3Le monde de Narnia : l’odyssée du passeur d’aurore de Michael Apted
Pourquoi me soumettre à l’épreuve de ce troisième opus me demandez vous ? Et bien parce que contrairement à beaucoup, j’ai pris un minimum de plaisir devant les deux premier opus qui avaient réussis à me divertir facilement. Mais avec ce troisième opus, mon indulgence est mise à rude épreuve. Fort heureusement, la conclusion (un minimum émouvante) semble annoncer la fin d’un cycle, ce qui permettrait d’éviter la mise en oeuvre de nouveaux opus si le film ne trouve pas de succès en salle. Je l’espère d’ailleurs au regard du danger plus qu’alarmant d’une telle production. Si il ne m’avait pas géné sur les deux précédents opus, le propos christiannique de la franchise devient ici un tantinet puant. En effet, j’ai été régulièrement dérangé par le tour que prenait le scénario. Au centre du récit, nous avons des personnages qui vont être soumis à la tentation (avarice, envie, luxure... j’en passe et des meilleurs) et vont gentiment employer leur temps à culpabiliser. Heureusement, le lion Aslan est là pour les bénir et leur oter le poids du pêché. L’analogie “Aslan=Dieu” est poussée dans de tels retranchements avec le final (j’existe dans votre monde mais sous un autre nom et il faut apprendre à me connaître... What the F... ?) que l’objet devient franchement nauséux. Dommage pour une oeuvre dont l’argument empruntant aussi bien à l’odyssée qu’aux aventures de Sinbad promettait un charmant divertissement. Malheureusement, l’action expéditive et des choix esthétiques faisant passer la grosse production pour un téléfilm de luxe ruinent tout plaisir. Il surnage pourtant quelques efforts de mise en scène (joli plan d’ouverture), une poignée d’images vraiment belles (merci à la photo de Dante Spinotti) et quelques effets spéciaux impressionnants au milieu d’une surenchère indigeste (le final avec le serpent de mer). Et puis voir Bruce Spence pousser le film vers la parodie pendant 5 minutes en surjouant comme un malade, ça n’a pas de prix.

poltergeist_2Poltergeist 2 de Brian Gibson
Je n’ai pas trouvé énormément d’avis sur cette suite au film culte de Hooper/Spielberg. Pourtant, si les deux compères ont quitté le bateau, la production de ce poltergeist 2 comporte du beau monde. Andrew Laszlow à la photographie, des effets spéciaux signés Richard Edlund, H.R Giger en consultant créatif et toujours Jerry Goldsmith à la musique. Des personnalités qui accomplissent chacun de leur côté un honnête travail mais auquel il manque l’influence d’un vrai chef d’orchestre. Inconnu au bataillon, le réalisateur Brian Gibson est l’archétype du faiseur qui, si il sait plutôt bien tenir une caméra, ne sait pas réfléchir sur l’art d’illustrer un script à la propension grotesque prononcée. Et poltergeist 2 dispose d’un scénario qui en tient une sacrée couche. Le processus spielbergien sur une famille ordinaire plongée dans l’horreur ectoplasmique prend rapidement le large pour une ambition foireuse de déconstruction du film original. Si le long-métrage contient des éléments fort intéressants sur l’évolution des personnages depuis le premier film (Craig Nelson et sa famille désormais ruinée tente de reconstruire leur bonheur d’antan, la banlieue a été complètement déserté suite à la catastrophe finale du précédent opus), cette suite s’acharne surtout à expliciter ce qui était judicieusement mis dans l’ombre. Le folklore indien y est employé plus de raison (faut voir Nelson chassant une créature en lui crachant une âme à la gueule), les évènements les plus abstraits trouvent une explication (le lien de la gamine avec les fantômes) et la menace omnisciente s’incarnant sous divers phénomènes se matérialise désormais principalement au travers d’un personnage de grand méchant. Le pompon sera atteint avec le climax dans l’au-delà. Laissé hors champs dans l’original, il nous offre ici une vision complètement ridicule et daté pour ne rien gâcher. De la belle merde dans laquelle les professionnels mentionnés ci-dessus n’avaient pas vraiment lieu de gâcher leur talent.

2 janvier 2011

Top/Flop 2010

C’est l’inévitable exercice de chaque fin d’année quand bien même son intérêt s’avère discutable : le top des meilleurs et pires films de 2010. Exercice vain pour certains, je trouve néanmoins qu’il s’agit d’un bon moyen de relativiser mon sentiment de ces derniers mois sur les sorties en salles. Sans top, je vous dirais certainement que l’année 2010 a été l’une des plus pauvres que j’ai connu depuis bien longtemps (voir les gros cacas cités juste en dessous et j’en ai encore plein sous le coudes). Avec ce top, je me dis quand même qu’il y a eu de belles choses cette année. Des images magnifiques, des émotions surpuissantes, des voyages vers des horizons insoupçonnés... Bref que tout n’est pas si noir. Le simple fait que 2011 marquera le retour de Dieu sur les écrans (j’y reviendrais pour la rétrospective de décembre) suffit à me donner définitivement confiance que le 7ème art continuera encore et toujours à nous transporter ailleurs.

Top 2010

1/ Toy story 3 – Lee Unkrich

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2/ Kick-ass – Matthew Vaughn

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3/ Fantastic Mr Fox – Wes Anderson

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4/ La princesse de Montpensier – Bertrand Tavernier

princesse

5/ Agora – Alejandro Amenabar

agora

6/ Scott Pilgrim vs the world – Edgar Wright

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7/ Mr. Nobody – Jaco Van Dormael

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8/ Lovely bones – Peter Jackson

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9/ Raiponce – Nathan Greno et Byron Howard

Raiponce

10/ Infectés – Alex et David Pastor

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Flop 2010

1/ Freddy, les griffes de la nuit - Samuel Bayer

freddy

2/ Twelve – Joel Schumacher

twelve

3/ Resident evil : afterlife – Paul WS Anderson

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4/ Twilight 3 : hésitation – David Slade

twilight_3

5/ Les aventures extraordinaires d’Adèle blanc-sec – Luc Besson

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6/ Le monde de Narnia : l’odyssée du passeur d’aurore – Michael Apted

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7/ The crazies – Breck Eisner

crazies

8/ Unstoppable – Tony Scott

unstoppable

9/ Skyline - Greg et Colin Strause

skyline

10/ L’apprenti sorcier - Jon Turteltaub

apprenti_sorcier

26 décembre 2010

Tarzan

tarzan_posterTitre original : Tarzan
Genre : le vrai livre de la jungle
Réalisation : Chris Buck et Kevin Lima
Scénario : Tab Murphy, Bob Tzudiker et Noni White
Casting : Tony Goldwyn, Minnie Driver, Glenn Close, Lance Henriksen et Nigel Hawthorne
Musique : Mark Mancina
Durée : 1H28
Sortie : 24/11/1999
Note : 7.5/10

Recueilli et adopté tout bébé par un clan de gorilles, Tarzan développe un instinct aussi sûr que celui des animaux sauvages. Ses aptitudes physiques et son intelligence lui permettent de prendre une place à part dans le luxuriant royaume de la jungle. Mais, quand il rencontre le professeur Porter et sa fille Jane, en expédition scientifique dans la jungle, Tarzan découvre qu'il existe d'autres êtres semblables à lui. Il devra bientôt faire un choix entre sa famille d'adoption et ses ascendances humaines.

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Vous connaissez la critique du détail ? Il s’agit d’un phénomène assez apprécié par les critiques qui ne comprennent pas le film visionné (ou qui n’en ont rien à foutre, c’est au choix). Comme il y a un papier à pondre à l’arrivée, ils vont prendre un détail qu’ils arrivent à appréhender et le grossir pour en tirer une analyse du film complet. Une technique qui bien sûr conduit à occulter tous les fondements du long-métrage par manque d’appréhension. Ainsi, si vous demandez à quelqu’un ce qu’il pense du Tarzan produit par Disney, il vous répondra très sûrement : “Mouais j’aime pas trop Phil Collins”. Le scénario, l’adaptation de l’œuvre d’Edgar Rice Burroughs, la mise en scène, l’animation ? Tout ceci n’est guère pris en considération et lorsqu’on évoque le projet, il vient immédiatement en tête les braillements de l’ex-chanteur de Genesis. Ce détail est devenu comme la preuve qu’il est légitime d’utiliser Tarzan comme le porte étendard de la connerie disneyenne. Les attaques sont allées bon train à sa sortie. Face aux performances technologiques mises en oeuvre, le public ne trouvera qu’à dire que les passages en skatefoot sont nuls parce qu’on voit que c’est fait par ordinateur (si vous comprenez la teneur de l’argument, s’il vous plait écrivez moi). A l’occasion de la diffusion sur C+ de son (excellent) jin-roh, le réalisateur Hiroyuki Okiura sélectionnera Tarzan et sa scène musicale du camp pour expliciter son mépris de l’industrie Disney. De même aujourd’hui, lorsque Guillermo Del Toro envisage de réaliser une nouvelle lecture du héros créé par Burroughs, il précise bien que ça n’aura strictement rien à voir avec la version Disney. Tarzan est presque devenu un punching-ball, un défouloir contre l’empire Disney alors qu’il s’avère une des dernières réussites du studio avant la descente aux enfers des années 2000.

On ne peut cela dit pas non plus rejeter certaines critiques qui sont loin d’être sans fondements. On peut par exemple pointer du doigt l’absence d’un retour de Tarzan vers le monde des hommes afin d’achever pleinement le développement du personnage. Une critique que l’on peut comprendre même si un tel choix s’installe dans la grande tradition narrative de Disney. Ce qui pourrait apparaître comme une vision étriquée de son sujet peut au contraire s’analyser comme le plus complète des efficacités narratives. En recentrant toute l’action dans la jungle, les scénaristes évitent la digression pour établir une ligne droite qui va directement au cœur du propos. L’écriture apparaît d’ailleurs d’un dynamisme brillant regorgeant d’idée quant à l’art de raconter son histoire. Le film s’ouvre ainsi sur une introduction sans dialogue plantant pendant 10 minutes ses personnages et leurs rapports. Et le long-métrage contient quantité de ce type de concept transmettant des informations le plus pertinemment possible. On notera ainsi le travail sur le langage, Tarzan s’exprimant en anglais avec les animaux mais par grognements avec les humains (simple mais au combien moins discutable qu’un Pocahontas et son tour de passe-passe magique). Il y a également la transition entre l’enfant et l’adulte, synthétisant en quelques minutes toute l’évolution du personnage au fil des années. Alors certes il peut paraître regrettable que l’action ne soit pas transportée en Angleterre mais on peut apprécier cette volonté de ne pas laisser dériver le film vers une direction qui pourrait ramollir son intensité.

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Surtout que contrairement à un insipide livre de la jungle qui pratiquait pourtant une politique similaire (Mowgli et ses compagnons suivent une ligne directrice claire jusqu’au village des hommes et sans aller-retour entre la jungle et la civilisation), Tarzan ne cède pas à la superficialité. Là où Mowgli n’évoluait absolument pas d’un pouce dans le film de Wolfgang Reitherman, Tarzan est quant à lui soumis à une vraie quête identitaire. Celle-ci passe tout autant par la relation avec son père d’adoption qu’avec la découverte de ses semblables. Le film y puise une résonance émotionnelle forte, transcendant le simple spectacle du divertissement. De la même manière, si le livre de la jungle se clôturait sur un éveil à la sexualité, Tarzan instaure tout son long une certaine tension sexuelle des plus détonantes. Jane ne se montre ainsi pas insensible à la pureté du physique magnétique de Tarzan pendant que le méchant Clayton exhibe à longueur de scène un gros fusil disproportionné. Fusil qui deviendra par ailleurs dans l’une des dernières scènes un outil significatif de l’opposition entre l’homme sauvage et l’homme moderne. Ce qui achève en définitive de faire de Tarzan un très bon Disney, c’est cette capacité de réussir à entretenir cette certaine maturité du propos avec les aspects les plus décomplexés du grand spectacle. A cet effet, la fameuse séquence musicale du camp apparaît moins comme un passage obligé insignifiant que comme une fantaisie tout à fait charmante.    

Cet équilibre dans le ton se retrouve également dans l’animation. Outre la brillante création de Tarzan par un Glen Keane toujours si génial, l’animation globale se montre exemplaire dans sa volonté de traduire la sauvagerie des animaux tout en conservant la caricature humoristique typique de Disney. Le résultat est juste excellent, tout comme le travail de reproduction de la jungle. Utilisant la technique du deep canvas (outil qui consiste à dessiner “à la main” des éléments volumétriques générés par ordinateur), les images de cette végétation à l’état brut sont époustouflantes et la mise en scène s’offre l’opportunité de l’explorer de la manière la plus immersive possible. Ne reste plus au bout du compte que la question musicale. Il faut admettre que les chansons sont clairement le point faible du projet. La maigre teneur des paroles ne leurs permet guère d’assurer la fonction de chœur qui leurs étaient dévolu. Mais, à l’instar du mésestimé frères des ours, on oublie trop rapidement le travail de Mark Mancina à la composition. De ce point de vu, si il ne fait pas totalement oublier le désistement d’Alan Silvestri, Mancina ne démérite pas pour autant et accomplit un beau travail dans sa recherche d’un dynamisme tribal.

Voilà ce qu’est Tarzan au bout du compte, une œuvre efficace peut-être pas d’une grande profondeur mais loin d’être si innocente et creuse que ce qu’on pourrait penser.

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5 décembre 2010

le monde perdu

lost_world_posterTitre original : the lost world
Genre : King Rex
Réalisation : Steven Spielberg
Scénario : David Koepp
Casting : Jeff Goldblum, Julianne Moore et Pete Postlethwaite
Photographie : Janusz Kaminski
Musique : John Williams
Durée : 2H09
Sortie : 22/10/1997
Note : 4.5/10

Quatre ans après le terrible fiasco de son Jurassic Park, le milliardaire John Hammond rappelle le Dr Ian Malcolm pour l'informer de son nouveau projet. Sur une île déserte, voisine du parc, vivent en liberté des centaines de dinosaures de toutes tailles et de toutes espèces. Ce sont des descendants des animaux clones en laboratoire. D'abord réticent, Ian se décide à rejoindre le docteur quand il apprend que sa fiancée fait partie de l'expédition scientifique. Il ignore qu'une autre expédition qui n'a pas les mêmes buts est également en route.

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Wouaaahhh... Voilà la réaction que risque de vous soutirer la vision de lost world

4 ans séparent le monde perdu de jurassic park. Entre les deux, Spielberg n’a rien tourné. Fainéantise d’un cinéaste qui n’a plus rien à prouver ? Aucunement. Disons plutôt une raisonnable prudence par rapport à la marche à suivre pour sa carrière. 1993 ne fut pas en effet uniquement l’année de sortie de jurassic park. Cette même année, la liste de Schindler aura été projeté sur les écrans du monde entier. Une sortie couplée qui fit jaser en son temps mais qu’importe les prétextes idiots que depuis tout le monde à oublier. À l’instar des palmarès, les polémiques passent et les grands films restent. Aujourd’hui, difficile de nier que ce doublé magnifique fait parti des opus les plus inspirés de son auteur. Une bonne raison pour ne pas cracher sur un deuxième service. 1998 se structure ainsi pour Spielberg de manière similaire avec un double programme composé d’un grand film académique à faire pleurer dans les chaumières (Amistad) et un pur divertissement avec profusion d’effets spéciaux (le monde perdu donc). Malheureusement, public et critique se mettront globalement d’accord pour descendre en flèche ses deux films. Aujourd’hui encore, Amistad et the lost world font partis des œuvres les plus mal-aimées de Spielberg. Un trop plein d’attente suite au doublé fabuleux serait-il en cause ? Pas vraiment tant il s’avère toujours difficile aujourd’hui d’être convaincu par ses deux opus. Cela dit, une révision ne fait jamais mal pour mettre un peu d’eau dans son vin... Mais juste un peu.

Le seul argument du film est suffisamment enthousiasmant pour accepter d’accorder une nouvelle chance au monde perdu. Désireux d’éviter la redite, Spielberg abandonne l’émerveillement contemplatif inhérent à jurassic park. Il tourne même littéralement le dos à l’ambition de ce dernier. Jurassic park devait à tout prix éviter l’écueil du film de monstre alors que le monde perdu va embrasser le genre à plein bouche. Voilà qui annonce une belle promesse de cinéma d’aventure surtout vu les références mises en avant. Il y a bien sûr le titre qui renvoie directement à l’ouvrage d’Arthur Conan Doyle. Mais il y a aussi toute la structure du film qui s’avère calquée sur king kong. A l’époque de jurassic park, Spielberg avait d’ailleurs utilisé le classique de Merian C. Cooper et Ernest B. Schoedsack pour expliquer en quoi son film n’appartient pas au même registre. Un juste retour des choses donc qu’il y rende hommage lorsqu’il décide de s’atteler véritablement à ce genre. Le monde perdu entretient donc des ficelles narratives similaires.

Un groupe de personnages débarque sur une île peuplé par un bestiaire ancestral, lutte pour leur survie, capture et ramène chez eux une créature (à noter que le bateau transportant le T-rex est le S.S Venture, le même navire qui véhicula Kong) qui va se libérer et semer le désordre en ville. Une base en forme de clin d’œil que Spielberg va développer de manière étonnante. Peut-être est-ce par rapport à cette joie de s’exercer au genre mais Spielberg fait ici preuve d’une décomplexion qu’on soupçonne rarement chez lui. On le sent donc prendre un plaisir redoutable lors d’une séquence de safari où il filme dans un même plan des jeeps et des motos avec ses dinosaures. Il y a là un anachronisme jubilatoire qui évoque d’autres bizarreries cinématographiques comme la vallée de Gwangi, film où une bande de cow-boys tombent sur une vallée perdue où règnent les fameux sauriens. Plus que son sadisme habituel (le remake gore du baiser de la belle et le clochard), Spielberg se permet même des privates jokes. Par exemple, lorsque le bus défonce le vidéoclub, on peut remarquer plusieurs affiches de films bidons avec Robin Williams et Tom Hanks ainsi qu’une version du roi Lear avec Arnold Schwarzenegger dans le rôle titre (clin d’œil à last action hero qui subira le contrecoup du succès de jurassic park ?).   

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Maman T-rex fait du ménage sur son territoire

Mais l’argument du film d’aventure n’excuse pas Spielberg de ne pas conserver le fond de réflexion fascinant de son premier opus. Si le rapport à la technologie n’a plus sa place ici, le sujet choisit reste parfait pour évoquer la frontière entre modernité et primitivité. Le film compte ainsi quelques belles illustrations de ce sujet. Lors d’une scène, les deux personnages féminins creusent un passage dans la terre afin de s’enfuir d’un hangar alors que les vélociraptors font de même de leurs côtés pour y entrer. En un simple passage de suspense, Spielberg met en perspective comment l’urgence de la situation renvoie l’homme civilisé à un état animal. Son bagage évolutif a beau lui faire croire supérieur aux sauriens, il se trompe lourdement. C’est ce qu’apprendra un des chasseurs qui inculquera la peur de l’homme à un petit bestiau avant que celui-ci ne vienne se venger en groupe. En reniant son statut animal, l’homme adopte un comportement et un fonctionnement absurde, stupide par rapport à l’ordre naturel des choses. L’arrivée du T-Rex à San Diego en est un bon exemple, Spielberg joignant en un seul plan les premiers pas en ville de la créature avec la situation de douaniers au prise avec des immigrés clandestins.

Avec tout ça, le monde perdu aurait du être très sympa surtout que Spielberg est loin d’être laxiste à la réalisation. Sa mise en scène reste remarquable dans sa recherche d’immersion et de spectaculaire. Il se fait d’ailleurs plaisir à exploiter les possibilités d’interactions des dinosaures (numériques ou animatroniques) avec les acteurs pour rendre plus palpable le sentiment de danger. Des effets spéciaux deux fois plus nombreux mais non moins soignés (impossible de deviner que le plan d’hélicoptère sur le colisée à été réalisé avec une maquette). Pour ne rien gâcher la photographie est excellente et John Williams réinvente brillamment sa partition originale. Mais alors diantre qu’est-ce qui coince dans ce film semblant si parfait ? Un sentiment de lourdeur peut-être. Lourdeur dans l’introduction (tout le monde s’accordera à dire que les dialogues entre Hammon et Malcolm sont loin d’être les séquences les plus captivantes du film) mais également dans tout son déroulement. C’est comme-ci le côté décomplexé de l’entreprise qui aurait dû libérer le film pesait dessus.

On aura ainsi du mal à passer outre le sacrifice sur les personnages, tellement traités par-dessus la jambe qu’on peine à s’y attacher. Une politique dont la déficience se résume à elle seule par le choix du héros. Alors que le professeur Grant se serait avéré le choix le plus logique pour mener une exploration sur l’île aux dinosaures, le scénario préfère débaucher le chaoticien Malcolm. La rock star qui passait son temps à lâcher des pics sarcastique dans le premier opus se montre de manière prévisible un chef d’équipe dépassé et peu à l’aise dans l’aventure. Les quidams plongés dans des situations extraordinaires ne sont pas nouveaux chez Spielberg mais on atteint ici un tel point de nonchalance que ça en devient impardonnable. Moins impardonnable cela dit que la problématique quant à l’enchaînement des péripéties. Car c’est finalement là le souci et le grand drame : les scènes d’actions sont incroyablement bien filmés mais jamais bouleversantes. Difficile en effet de trépigner devant l’action et surtout d’y croire lorsque celle-ci devient si abracadabrantesque (la caravane suspendue dans le vide et ce passage nonsensique de la vitre se fissurant) ou au contraire si maigrement exploitée. On citera là notamment le dernier acte très bancal. Le désastre attendu s’avère en effet fort minime puisque le T-rex se contente de provoquer quelques accidents de la route et de bouffer le scénariste David Koepp qui passait par là le temps d’un caméo.

Faut-il d’ailleurs voir là dedans un signe précurseur des temps à venir où quantité de yes-man laisseront les effets spéciaux dévorer un véritable travail d’écriture ? Vu la lucidité sur le medium dont a fait preuve Spielberg dans le premier opus, il n’y a qu’un pas à franchir pour répondre par l’affirmative. En dépit d’une bonne volonté évidente pour les raisons exprimées ci-dessus, toute la virtuosité de Spielberg et les fabuleux effets spéciaux ne peuvent enlever cette impression d’un film qui n’est absolument pas à la mesure de ce qu’il est censé offrir.

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Ça sert à rien de courir David ! Tu vas apprendre que c’est pas bien d’écrire des scripts de merde !

4 décembre 2010

critiques en vrac : novembre 2010

Encore un mois sans grande activité sur le blog et je ne peux que m’en excuser. Car après tout, je n’ai absolument rien pour me pardonner. Novembre fut le premier mois depuis longtemps à compter autant de découvertes savoureuses (enfin en DVD et à la télé, parce qu’au cinéma c’est toujours pas ça). Moult visionnages enthousiasmants ou pas (c’est pas parce que c’est bancal que c’est pas intéressant) et de relectures étonnantes (c’est dingue la portée onirique que revête Armageddon) ont parsemé donc le mois, ce qui aurait dû me donner matière à plein de critiques. Ah ça des idées pour des critiques j’en ai mais assommé de travail comme je suis, je ne trouve pas temps et motivation pour m’y atteler. C’est donc dans les cartons que reste la critique de Tarzan (faut que je passe par la case commentaire audio pour collecter quelques infos supplémentaires), l’analyse d’E.T (tellement de pistes de réflexions que j’ai peur de foirer le papier), les approches de l’enfer du devoir, leviathan et driven (nécessité absolue d’y rejeter un œil pour ne pas écrire sous la dictée de vagues souvenirs). Voilà donc ce à quoi il faudra vous attendre dans les semaines à venir. Et si rien n’arrive, n’hésitez pas à me tanner pour.

sunshineSunshine d’Istvan Szabo
Les hasards du calendrier sont franchement curieux. Rendez-vous compte : le 3 mai 2000 sortait dans les salles françaises snow falling on cedars de Scott Hicks et ce sunshine. Il est assez incroyable que soit distribué simultanément ces deux grands films académiques qui sous couvert qu’ils ne seraient que de plombant devoir de mémoire n’ont suscité qu’indifférence du public et des critiques. Une erreur a réparé d’urgence (je précise que si vous n’avez toujours pas vu le Hicks, faudrait vous bouger le cul). Porté par un alléchant all-star cast (Joseph Fiennes, Rachel Weisz, William Hurt, Deborah Kara Unger, Mark Strong, Rosemary Harris...), sunshine impressionne en faisant preuve d’une richesse auquel je ne m’attendais pas. Si Szabo semble tenir à cœur de raconter l’histoire de sa Hongrie natale, la grande Histoire apparaît étonnamment en retrait dans son film. Le fil des évènements historiques sert surtout à donner un pouls à son intrigue. Il injecte dans le film une pulsation dans sa manière de dépeindre les revirements de l’histoire où les victimes deviennent des bourreaux et les bourreaux des victimes. Cela met en perspective cet ambitieux récit de saga familiale sur trois générations. La reconstitution historique est ainsi assez secondaire. Malgré un certain soin visuel (beaux décors et photographie aux petits oignons), on ne tombe jamais dans le faste ou l’inutilement clinquant. Szabo évite d’ailleurs de recourir au cinémascope généralement de rigueur sur ce type de production et opte pour un 1.77 plus intime, l’essentiel restant dans les personnages. Comme le monde qui évolue par va-et-vient, les membres de la famille Sonnenschein vont fonctionner selon le même schéma. Les intrigues se répètent mais les positions changent pour former un très émouvant et poétique système d’échos. L’ensemble devient alors un gigantesque questionnement existentiel (est-on la conséquence de sa famille, de son histoire et de l’Histoire ?) de 3 heures captivant de bout en bout. Selon moi, c’est sans l’ombre d’un doute un grand film mésestimé.

monkeyIncidents de parcours de George Romero
Jusqu’à présent, mon exploration de la filmographie de Romero s’est limitée à ses œuvres zombiesques. Personne n’est parfait mais je me soigne. Alors que Martin attend sagement sur mes étagères, je me suis aventuré vers cet incidents de parcours. Et quel film ! Romero signe là une bouleversante histoire, sorte d’hommage actualisé à Edgar Allan Poe. Le film relate ainsi la relation qui lie un paraplégique avec son singe apprivoisé. Une base façon mélodrame qui donne du sel à un projet qui aurait pu tomber dans le ridicule avec des mains moins habiles. La première partie décrit ainsi son couple improbable comme des personnages rejetés et perdus. Notre coureur désormais paralysé est entouré de personnages qui n’en ont plus rien à foutre de lui (les convives à sa fête de retour lui tournent le dos, sa copine le quitte) et ne voit plus la suite des évènements que de leurs points de vu nombrilistes (l’infirmière prend soin de lui uniquement parce que c’est son boulot, sa mère s’incruste pour se donner bonne conscience). Il en va de même pour le singe qui est considéré uniquement comme un cobaye à diverses expérimentations fort douteuses. Leur rencontre donne lieu à un effort de reconstruction assez attendrissant. Et la suite de décrire comment la situation dérape pour devenir un questionnement sur l’évolution culminant dans un climax brutal. La mise en scène de Romero est d’ailleurs excellente avec un ton simple mais percutant. C’est d’ailleurs quelque chose que j’admire même dans ses films les moins inspirés : une capacité à rendre efficace ses films avec généralement pas grand-chose à disposition. Reste quand même à mon goût un petit bémol avec l’aspect surnaturel apposé au récit qui, un peu à la manière des révoltés de l’an 2000, m’apparaît comme une incursion chargée de justifier certains développement de l’histoire tout en diminuant leurs portées dérangeantes. Petite anicroche (avec la fin guimauve) d’un film qui reste une redoutable série B.   

parrain_2Le parrain 2 de Francis Ford Coppola
Je fais partie de cette race qui a tendance à dire que le parrain, c’est bien mais quand même un peu chiant sur les bords. Désolé mais c’est comme ça. Passé une première partie passionnante, j’ai du mal à me passionner pour les histoires de la famille Corleone. Une impression qui m’a poussé à ne pas m’aventurer dans les suites malgré un second opus réputé encore plus fort que l’original. Surprise, je ne me suis pas ennuyé une seule seconde devant cette sequel. Les démêlés de Michael Corleone pour conserver son pouvoir m’ont passionné de bout en bout. Chef d’oeuvre donc ? Pas vraiment car la vision de Coppola sur son sujet ne me convint toujours pas complètement. Il est clair que le parrain 2 repousse les ambitions de l’original : récit sur deux lignes temporelles, usage très prononcé du dialecte sicilien, expérimentation encore plus prononcée sur la photographie... Mais tout cet attirail me renvoit à cette impression que j’avais devant l’original. Celle d’une gravure fabuleuse mais rigide et manquant de vie. Alors qu’un concept comme les va-et-vient temporels devrait me séduire, il me laisse septique quant à leur portée émotionnel. Il n’y a vraiment que le dernier flashback qui ait réussit à me bouleverser et a révélé la profondeur de l’oeuvre. Un ultime retour en arrière permettant d’offrir une fin magnifique et dérassante, échappant au carcan de gigantisme solennel pour atteindre une véritable fibre sensible.

horusHorus, prince du soleil d’Isao Takahata
Réalisé à la fin des années 60, Horus prince du soleil fut une occasion pour Isao Takahata, Hayao Miyazaki et toute une génération d’animateur de montrer ce qu’il avait dans le coltard. Dans la courte interview en bonus du dvd, Takahata déclarait qu’il avait abordé le projet non comme une oeuvrette destinée aux enfants mais comme un vrai film de cinéma. La scène d’ouverture donne le la de cette orientation. Cinémascope à l’appui, on suit le jeune héros à travers sa lutte contre une bande de loups dans un jeu constant et étourdissant des profondeurs de champ. Le film brille d’ailleurs par ses ambitions de mise en scène avec cadrages et mouvements de caméra aussi ambitieux que palpitants. Les artistes à l’œuvre en veulent et on sent un soin constant apporté à l’ouvrage. Takahata affirme d’ailleurs que cette exigence maniaque donna un tour laborieux à la production et on veut bien le croire lorsque certaines limites de moyens mettent un brusque terme à leurs ambitions (la grande attaque des loups sur le village ne bénéficiera d’aucune animation et ne constituera qu’un enchaînement d’image fixe). Ambition se retrouvant dans le script qui commence pourtant sur des prémisses inquiétantes. Le ton est très naïf, la narration mécanique à souhait, les dialogues sont à la limite du ridicule... Malgré ses clins d’œil mythologiques, l’objet apparaît rudimentaire au premier contact. Bizarrement, le film trouvera sa stabilité et son intérêt en mettant de côté son héros titre et sa quête pour s’intéresser aux intrigues de village et surtout au personnage d’Hilda. Personnage éminemment complexe tiraillé entre le bien et le mal, elle donne tout son souffle au film en lui offrant émotion et poésie. Le film échappe ainsi à la simplicité qui le guettait et nous rappelle que Takahata est bien un grand.

faux_mouvementUn faux mouvement de Carl Franklin
Je ne connaissais absolument pas l’existence de one false move jusqu’à la lecture du hors série de mad movies consacré à Sam Raimi. Le réalisateur de evil dead y déclarait que la plus grande erreur de sa carrière fut de refuser la direction de ce projet. Une erreur qu’il cherchera à réparer en dirigeant le magnifique un plan simple quelques années plus tard. Forcément qu’un cinéaste de la trempe de Raimi émette un tel jugement sur cette production a de quoi faire saliver. Et effectivement, le film a énormément de qualité et fait regretter que Raimi ait renoncé à s’y atteler. Le script suit deux trajectoires. La première est celle de truands dont le parcours meurtrier est jalonné par une violence froide et crue. La seconde est celle d’un policier de campagne, maître d’un petit monde idéalisé qui va s’effondrer par ces interventions extérieures faisant ressurgir les fantômes du passé. Un script riche qui ne manque pas de troubler par tous les questionnements qu’il soulève. La réalisation me laisse toutefois assez dubitatif justement par rapport à ce qu’un réalisateur comme Raimi aurait pu apporter au projet. Franklin n’est pas un mauvais bougre. Il reste très appliqué (la préparation du climax avec ses plans décadrés... qui sonne justement comme du Raimi) et offre de très belles choses (le poignant plan final notamment). Mais je trouve qu’il installe une certaine distance, une neutralité dans sa mise en scène. Cela reste cohérent par rapport à son choix dans la représentation de la violence qui se rapproche de l’excellent et déplaisant Henry portrait d’un serial killer de John McNaughton. Mais je suis sûr qu’un réalisateur immersif comme Raimi en aurait tiré quelque chose de plus frappant et dérangeant. Enfin bon, tout ceci fait très comparaison avec un film fantasme qui ne verra jamais le jour (enfin si mais sous une autre forme) et un faux mouvement reste en l’état une œuvre des plus fortes.

buriedBuried de Rodrigo Cortès
Il y a de ces films qui vous laissent une bonne impression sur le moment mais qui lorsqu’on y repense s’avère assez vain. Un peu de recul et bouf, on ne sait plus pourquoi on s’est montré si enthousiaste à la projection. Buried fait parti de ceux. Le film de Cortès se suit avec intérêt durant ses 90 minutes grâce à une tension constante et une exploitation jusqu’auboutiste de son concept. Mais au bout du compte, il reste un exercice de style qui tourne un peu en rond. Pourtant, je ne dirais pas qu’il y a une absence totale de réflexion dans le film. L’une des idées du script est d’avoir donné au personnage un moyen de joindre l’extérieur. Le script aurait pu essayer de se concentrer sur l’organisation de la survie du héros. Il le fait d’ailleurs ponctuellement (je pense notamment au terrifiant face-à-face qui aura réveillé quelques vieilles phobie) mais il rajoute une autre dimension grâce à l’emploi du téléphone portable. Alors que cet outil devrait lui offrir toute l’aide souhaitable, il ne lui donne que de faux espoirs tant tous ses intervenants sont incapables de nouer une vraie communication. Le film épingle pas mal les comportements de ses contemporains à travers sa galerie de personnages secondaires. Il y a un côté très hitchcockien là dedans allant d’ailleurs très bien avec ce pitch qui aurait probablement plu au maître. Cortès ne nie d’ailleurs pas cette influence avec un générique à la Saul Bass et une musique qui sonne comme du Hermann. Voilà qui donne un peu de relief au-delà de la stricte démonstration de maîtrise cinématographique (beau découpage, idées de mise en scène souvent incroyables, mixage sonore prenant).

harry_potter_7Harry Potter et les reliques de la mort – 1er partie de David Yates
Voici donc la première partie de l’ultime épisode des aventures du sorcier binoclard. Ultime stratagème pour exploiter le filon jusqu’au bout ? Oui et non. Si les financiers doivent se frotter les mains de disposer de deux films pour le prix d’un, la technique permet de pallier au problème d’adaptation que se traîne la franchise depuis le quatrième opus. Ce septième Harry Potter arrive ainsi à tenir en haleine. On se retrouve enfin face à un script bien rythmé, équilibré et correctement structuré. On est très loin de cette impression de résumé mal torché des bouquins qu’on se coltinait sur les derniers épisodes. Il est désormais possible de savourer le travail sur les personnages, l’univers et les enjeux sans avoir l’impression de bout à bout sans queue ni tête. En tout cas, pendant une bonne heure. Les ennuis reviennent avec une deuxième heure peu reluisante et franchement léthargique, très justement surnommé “Harry fait du camping” sur la toile. Mais quitte à critiquer quelqu’un pour cela, ça ne serait pas tant le scénariste Steve Kloves (véritable bête noire de la franchise) mais plutôt la personne à l’origine de tout : J.K Rowling. Car après tout, c’est bien sa faute si la grande fresque épique qui devait constituer la fin de la série, c’est transformé en interminables scènes de dialogues. Reste donc qu’une moitié de film fort prenante et des efforts qui m’enchantent toujours autant pour concrétiser le monde de la magie.

get_carterGet Carter de Stephen Kay
Au début des années 2000, ça va mal pour Sylvester Stallone. Le succès n’est plus au rendez-vous et tout le monde a un peu tendance à se foutre de sa gueule. Il faut que ça cesse. Pourquoi ne pas alors accepter un petit projet de revival 70’s pour redorer son blason ? Cette nouvelle adaptation du Jack’s return home de Ted Lewis (ou remake de la loi du milieu de Mike Hodges si on préfère) semble être une occasion parfaite dans cette optique. La base est bonne (un homme de main retourne dans sa ville natale pour enquêter sur la mort de son frère) et le casting met de la joie (Miranda Richardson, John McGinley, Mickey Rourke et Michael Caine pour faire le pont avec la première adaptation). Du côté de Stallone, il n’y a pas grand-chose à redire. Le bonhomme investit son rôle avec sérieux et lui donne toute la présence nécessaire. Là où ça bloque, c’est plutôt à cause de son metteur en scène. Le revival 70’s nécessitait une réalisation sèche et brutale. Si Kay est capable de livrer des images qui répondent à ces critères, il se tire rapidement une balle dans le pied en balançant des effets de montage grotesques sur un fond musical à côté de la plaque (probablement la pire composition de Tyler Bates). Voilà qui diminue grandement l’impact de cette réexploration du polar hard-boiled de Lewis déjà rendu très précaire par certains choix scénaristiques (la fin façon WTF). Du retour en force gâche en somme.

aladdin_roiAladdin et le roi des voleurs de Tad Stones
Si je ne me trompe pas, Aladdin fut le premier héros Disney à ouvrir la voie de la suite en DTV. Pas vraiment un honneur quant on sait que ce genre de produit mercantile est synonyme de médiocrité. Impression renforcée par le retour de Jafar, sequel d’une médiocrité effarante. Il m’a donc fallu une bonne dose de masochisme pour m’aventurer dans cette seconde sequel dont l’argument (Aladdin rencontre son paternel) démontre clairement l’ambition de la chose. De manière surprenante, j’ai passé un relatif bon moment devant la chose. On retrouve pourtant pas mal des défauts de son prédécesseur avec des chansons insupportables, une intrigue minimaliste et une animation souffrant d’un sérieux manque de moyen. Toutefois, il s’agit là d’une aventure fort regardable grâce à un récit rythmé (utilisation assez alléchante de la mythologie), un humour plus hystérique que jamais (le génie nous fait un festival d’imitation) et un soin visuel un peu plus poussé qu’à l’accoutumé (le final offre notamment un minimum de spectaculaire). Quelques qualités qui évitent de donner l’impression de trop perdre son temps face à un bidon de lessive.

unstoppableUnstoppable de Tony Scott
Les bandes annonces sont quand même de belles salopes. Alors que celle du dernier Tony Scott promettait un sympathique divertissement carré et efficace, je me suis farci l’un des films les plus moisis de cette année. Avec ce décalque du téléfilm atomic train (qui paradoxalement s’avèrera nettement plus ambitieux que son homologue cinématographique), Tony Scott nous sort un de ces films d’action actuels qui fait dans le remplissage. Film catastrophe sans grande catastrophe et au bodycount insignifiant, unstoppable fait dans le brassage d’air comme bon nombre de ses contemporains. Pendant 80% du long-métrage, nous allons donc voir une tripotée de personnage paniquer en regardant des plans d’hélicoptère d’un train sur leurs téléviseurs et en s’exclamant “ho là il roule quand même très vite”. C’est dire la tension qui règne. Pas étonnant que ni Denzel Washington, ni Chris Pine et ni Rosario Dawson ne se montrent très concernés par l’affaire. Scott ni croit de toute évidence pas non plus, recyclant de manière bien pantouflarde ses effets de style mise au point depuis près d’une décennie. Heureusement, il se réveille lors des trop rares moments d’action où il capte avec bruit et fracas ses quelques cascades. A tout casser, cela fait un quart de film regardable dans un summum d’ennui. 

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